Il a certainement accepté parce qu’il fallait bien qu’il sorte un peu de son trou. Il passait son temps à travailler et aller en cours, rien de plus. Il omettait les repas et les sorties, il ne respirait plus que pour se focaliser sur le travail. Ca faisait peur. Ca faisait réellement peur. Alors, quand Shuji a annoncé ce que la fac organisait pour la Saint Valentin, il a fini par céder, mais, ne sachant avec qui aller, et ne voulant pas se retrouver avec un inconnu pour on ne sait quelle mésaventure, Syuhei avait décidé d’entraîner Hui Liang avec lui. Ce n’est malheureusement que plus tard qu’il avait su qu’il fallait y aller travesti… Contrairement à son frère aîné, Long n’était pas fan de cette technique. Malgré ses tendances, malgré ses excentricités, il était un homme et il aimait ça. Et aussi investi qu’il soit dans la mode féminine, il n’avait jamais pensé à porter ses vêtements là. Et avec sa morphologie en plus ? Il avait mis bien trois heures à décider quoi enfiler. Un haut évasé rayé pour donner l’illusion de formes, une jupe qui ne le mettrait pas trop mal à l’aise, et des bottes noires. Retrouvant Hui Liang devant l’amphi, il ne peut s’empêcher d’éclater de rire. Ca faisait du bien de rire, il avait l’impression de ne jamais l’avoir fait. Il en avait les joues douloureuses. « Tu sais que j’ai pour habitude de dire que ta beauté m’emmerde, mais là, là mon petit chinois, je suis bien plus fabuleuse que toi. » Il se mit face à son ami et embrassa sa joue. Syuhei était toujours du genre pudique, il n’aimait pas du tout montrer de signes d’affection en public, mais avec Liang c’était différent. Il avait ce pouvoir sur lui qui le mettait à l’aise où qu’ils se trouvent. « Bon, allons découvrir ce qu’on nous réserve, et tu t’es foiré en mettant du rouge à lèvres, tu penses que j’aurais dû écouter Shu et avoir mis une perruque ? » Il pouffe encore, et l’entraine dans l’amphi, allant directement vers l’urne, sachant ce qu’il fallait faire. Le jeune métisse en sort un petit papier et le tend à son âme sœur. « A toi l’honneur, que doit-on faire ? »

Hui Liang avait envie de mourir. Il n'avait jamais eu aussi honte et ne pouvait s'empêcher d'imaginer ce que ses parents penseraient de lui si jamais ça remontait à leurs oreilles. Il était habillé assez sobrement, il portait une petite jupe rose - qui lui procuré la sensation désagréable de sentir le vent s'insinuer entre ses cuisses - ainsi qu'un pull blanc l'accompagnant. En ce qui concernait les chaussures, il n'avait même pas osé imaginer passer toute la soirée en talons alors il avait opté pour des tennis blanches avec des chaussettes noires qui lui remontaient jusqu'aux genoux. Cette tenue ne lui allait décidément pas et pour couronné le tout, il portait une perruque qui lui grattait la tête. Retrouvant Syuhei devant l'amphithéâtre, celui-ci ne se gêna pas pour se foutre littéralement de sa gueule. « Je suis d'accord, tu es vraiment fabulous ! Tu devrais t'habiller comme ça plus souvent ! » Voir Syuhei habillé de cette façon lui avait redonné le sourire. Cela ne servait à rien de bouder et d'âtre gêner au final, car après tout, tous les mecs étaient déguisés en fille et c'était vraiment moche à voir ! Hui Liang se laissa entraîner dans l'amphi, s'essuyant la bouche pour essayer de retoucher un peu son rouge à lèvres. « Oh non ! T'as bien fait de pas en mettre mec, la mienne me gratte comme pas permis, j'ai l'impression qu'on me scalpe là-dessous ! » Une fois devant l'urne, Hui Liang y plongea la main et s'amusa à remuer les petits bouts de papier pendant quelques instants avant d'en attraper un et de le montrer triomphalement à Syuhei. Il le déplia lentement, histoire de créer un peu de suspens et regretta tout de suite son choix. « On doit... Faire un maximum de mouvements de danse wtf, bizarres, osés pour que le pedomètre atteigne le plus haut résultat. » Silencieux, Hui Liang jeta un rapide coup d’œil à la piste de danse improvisée au milieu de l'amphi, au milieu de tout le monde. Il soupira, tandis son bras à Syuhei avec une attitude de gentleman - malgré son accoutrement - et lui fit un grand sourire. « Milady, prête pour une petite danse ? »

« M’habiller comme ça plus souvent ? Evite de me castrer, s’il te plaît Zhu… » Zhu, diminutif de Zhuzhu, mot affectif mandarin pour les couples, mais, Syuhei aimait bien, parce qu’en mandarin, ça voulait littéralement dire « petit cochon », et il trouvait ça très adapté pour son meilleur ami. Une légère moue, et ils entraient dans l’amphithéâtre. « Alors si ça te dérange… » Le taiwanais sortit son téléphone, et se prit en photo avec Hui Liang une bonne demie douzaine de fois, embrassant sa joue, ou se servant de ses nouveaux cheveux pour se faire une moustache, avant de le regarder à nouveau en riant. Il voulait tout de même des souvenirs du chinois dans cette tenue. « Retire la ! » Lentement, Syuhei lui ôta sa perruque, ébouriffant les cheveux de son ami. « J’aime bien tes cheveux comme ça moi, pas coiffés. » S’il y avait bien quelqu’un qui recevait autant de critiques que de compliments de la part de monsieur Long, c’était bien monsieur Si. Toutes ces années de complicité avaient réussi à rendre Syu totalement à l’aise quant à Liang, et totalement accro aussi. Lorsque ce dernier déplia le petit papier, le taiwanais en profita pour réajuster son boxer sous sa jupe. Sans jean, sans pantalon, enfin, sans tissu supplémentaire, c’est fou ce que ça pouvait bouger là-dessous… « Le pédo quoi ? Si j’étais pervers, je n’aurais pas pensé à la machine pour compter les pas… » Il pouffa, tournant la tête vers la petite scène. Et puis, son sourire s’estompa, retroussant le nez. « Je t’ai dit de ne pas me castrer, pourquoi c’est moi la fille ha ? » Malgré ça, il s’accrocha au bras de son âme sœur, reprenant son portable dans sa main. « Puisqu’il faut danser, il nous faut de la musique, tu ne crois pas ? » les sourires que Syuhei offrait à Hui Liang étaient toujours sincères et enfantins, lui montrant ensuite une sélection de chansons sur son écran, sa main libre encore posée sur le bras de l’autre jeune homme. « Puisque le pédomètre comptabilise les mouvements des hanches… on devrait danser sur quelque chose qui bouge bien non ? » L’expression de Syu change en fixant l’artiste face à lui, se mordant l’intérieur de la joue, pensif. « T’as un bon coup de bassin tu crois ? » mais ce n’est qu’après avoir lâché sa phrase qu’il s’était rendu compte de comment il l’avait formulée.

Hui Liang éclata de rire. Syuhei l'avait tellement pris au dépourvu qu'il était à moitié en train de s'étouffer et de mourir. « Ouais bro, j'ai un bon coup de bassin ! On me l'a répété plusieurs fois ! » Toujours en train de rire, il retira sans aucune discrétion son caleçon qui lui rentrait dans la raie. « T'aurai vu ta tête mec, en mode "merde, j'aurai pas dû dire ça !" ahah !! » Il continuait de ricaner comme une hyène, un sourire débile sur la gueule. Il entraîna son partenaire de danse sur la piste improvisée, au milieu de tous les regards. « Bon, mets un truc sur lequel on peut bien bouger ! On est censé faire des mouvements débiles donc.. » Hui Liang avait du stock en danse wtf, alors il se lança sans plus attendre. Plus vite ils commenceraient, plus vite ça serait fini ! Enfin c'est ce qu'il espérait tout du moins. Sa jupe remontait à cause de sa danse plutôt pitoyable et il n'arrêtait pas de tirer dessus en râlant. « Putain, je sais pas comment elles font les meufs pour danser avec des trucs pareil ! » En jetant un coup d’œil autour de lui, il repéra un gars qui portait des talons hauts et qui faisait la grimace. Un cri de triomphe s'éleva en son for intérieur, il n'osait même pas s'imaginer en train de bouger comme un ksos avec des échasses aux bouts des pieds. Il commençait un peu à s'essouffler, c'était fatiguant mine de rien cette connerie. Zieutant Syuhei, il s'approcha par derrière et s'affala sur ses épaules, croisant les bras autour de son cou avec un rire enfantin. « Dis, on fait une pause ? Ça fait un moment que j'avais pas autant bougé, je suis crevé ! » Hui Liang aimait bien jouer les bébés de temps en temps, histoire de faire chier un peu son pote et en général il était plutôt bon dans ce domaine.

Et c’était dans des moments comme celui-ci que Syuhei se sentait encore plus perdu. Il comprenait ce que son frère ressentait à la perfection dans des instants comme celui-ci. « Répété plusieurs fois »… Long le savait bien, que la vie sexuelle de Hui Liang était mouvementée, contrairement à la sienne, cela dit, il sentit un pincement au cœur en l’entendant prononcer ses paroles. Il ne l’avouerait certainement jamais à haute voix, mais, Syuhei était jaloux. « En même temps, je juge que je n’aurais pas dû dire ça, désolé si j’aime être droit parfois. » Et voilà, il en faut peu pour refroidir le petit Syu des fois. Il soupira avant de revêtir un sourire, sachant qu’il n’avait pas à bouder ou plomber l’ambiance juste pour cette réplique.

Cherchant dans son portable, il finit par lancer une chanson qu’il avait découverte lors de son dernier voyage en Californie, qu’il adorait, et puis, il adorait le chanteur aussi. Même si le jeune homme préférait jouer de la musique, il savait danser sur celle-ci. Il était juste plus timide dans ce domaine là, habitué à être droit et fier, distorsionner son corps n’était pas son fort. Seulement, le rire l’emporta en voyant Liang faire le con, et puis, du coin de l’œil, il vit les nombres défiler sur l’écran de la machine. « Je me fiche de savoir comment elles font, continue à faire le cotorep, le compteur apprécie lui ! » En fait, vu que Syuhei n’était pas fan du ridicule, il ferait juste des petits sauts en riant, filmant son meilleur ami, qui ferait tout le sale boulot à sa place. C’est ça aussi être un « Shu » après tout. En se tournant pour regarder la machine affichant plus de la moitié du but, il sentit des bras se fermer autour de ses épaules, frissonnant vivement à ce contact, le souffle du chinois tapant contre sa joue et sa tempe, se contrôlant au mieux pour ne pas rougir. « Si tu venais t’entrainer avec moi plus souvent, tu ne serais pas essoufflé comme ça petit gros. » que des mots d’amour, toujours, encore. « Je n’ai pas amené à boire, tu veux qu’on aille trouver un distributeur, quoi que, je parie qu’il y a à bouffer dans cet amphi, c’est forcément le cas. » Il tourne alors la tête pour voir le visage de Liang. « Atteint le maximum du compteur, et on trouve quelque chose de frais à boire comme récompense, ça te va ? » Il sourit, passant une main dans les cheveux déjà ébouriffés du jeune homme. Aish, il avait quand même quelque chose de sacrément spécial ce Si Hui Liang.

C'est vrai qu'il avait un peu laissé le sport de côté depuis quelques temps, et ça se faisait ressentir ! Mais de là a être un petit gros.. Hui Liang fit la moue et se tâta le ventre à la recherche de surplus de graisse, quelque peu vexé. Puis avec un sourire enfantin, il donna une petite tape sur les fesses de Syuhei. « La prochaine fois que tu feras du sport, appelle moi ! Comme ça je deviendrais pas un gros lard ! » Sa bouche était sèche, il avait vraiment soif. Il regarde aux alentours pour détecter un distributeur, mais en vain. Il y en avait sûrement un dehors.. Le contact de la main de Syuhei dans ses cheveux lui apporta un peu de fraîcheur et surtout un regain de vitalité. Sans un mot, juste avec sa tête de débile, Hui Liang se remit à danser comme un dégénéré. Il était complètement crevé mais il refusait de s'arrêter tant que le compteur n'avait pas explosé. Après quelques minutes très intenses, il eut la joie de voir les numéros défiler et atteindre le plus haut résultat. Il se laissa alors tomber comme une merde sur le sol, essoufflé au point de gerber ses boyaux. Dans un dernier effort, il se traîna vers Syuhei et resta allongé à ses pieds, les yeux fermés. « Plus.. plus jamais.. je fais ça ! Je crois que.. que j'ai fais assez de sport pour tout une vie ! » Roulant sur le ventre, il se gigota de douleur sur le sol. Tous ses membres le faisaient déjà souffrir, il n'osait même pas imaginer ce que se serait le lendemain. Dans un dernier effort, il se leva tant bien que mal et s'affala sur le dos de Syuhei. « On peut boire maintenant ? Et manger ? Et dormir ? C'est fini bordel ! Achètes moi un truc, tu me dois bien ça bro.. » Hui Liang couinait comme une gamine tout en se dirigeant vers la sortie. La seule chose qui le motivait à bouger encore, c'était qu'il forcerait Syuhei à lui acheter de la bouffe ! En tout cas, il gardera un souvenir douloureux de cette soirée !

La prochaine fois… La prochaine fois. Un sourire espiègle apparut sur le visage du blond. Il préférait se concentrer sur ce que son ami disait plutôt que de se concentrer sur la tape qu’il venait de recevoir sur ses petites fesses. « La prochaine fois c’est demain Liang, je m’entraîne quasiment tous les jours tu sais ? » On aurait du mal à croire que Syuhei était ceinture noire quelque part, et pourtant, il maîtrisait très son sport. Le karaté avait été un des remèdes qu’il avait trouvé plus jeune pour essayer de vivre plus aisément avec ses migraines constantes, et puis, il est plus sain pour lui et sa mémoire si infaillible, de mémoriser et décortiquer les attitudes de l’adversaire. En somme, oui il était mince, mais il était aussi musclé, et aimait l’endorphine que son cerveau sécrétait lors des entraînements. « Je suis sûr qu’un peu plus de joues t’irait à merveille mon petit gros » Il rit encore. Et plus fort lorsque Hui Liang se mit à ramper vers lui. « Ce n’est pas ta mère qui est professeur de Taekwondo ? Elle aurait honte de toi maintenant ! » rajouta-t-il en reprenant son calme. Syuhei l’aida à se relever, et l’accueillit avec plaisir contre son dos une nouvelle fois. « Tu veux que je te porte peut-être ? » Liang était peut-être l’aîné de quelques mois, mais, dans le fond, c’était peut-être lui qui aimait faire l’enfant le plus souvent. En même temps, tête en l’air comme lui et insouciant, on ne pourrait faire autrement. « Oui, boire, manger, dormir même si tu le veux, moi je veux surtout récupérer des vêtements faits pour moi, je ne suis vraiment pas à l’aise là dedans. » Une main posée sur les bras croisés de Liang autour de son cou, il avançait avec lui. « Bon, on va aller chez moi, ça te va ? » qu’il dise oui ou non, le choix de Syuhei était fait. Ce fut drôle comme animation, mais tout avait une fin.


SUJET CLOS