Sunmi n'avait pas compris tout de suite l'agitation anormale qui régnait dans les couloirs. Les gens tout autour d'elle semblaient plus pressés que d'habitude et n'hésitaient pas à la devancer – ou pire ; à la bousculer. Au bout du troisième impacte la Jeopardize s'était finalement résolue à retirer les écouteurs de ses oreilles pour partager son indignation dans un éclat de « regarde où tu marches, quoi » ponctué d'un « non mais j'y crois pas sérieux » agrémenté d'un regard outré. Pour terminer le tout, le plus surprenant dans l'histoire c'était que l'élève qui avait stoppé sa course en entendant Sunmi râler n'était autre qu'un membre de sa propre fraternité jaune et, qu'en plus de ne pas lui adresser d'excuse, l'étudiant lui avait simplement conseillé de se rendre dans la salle d'exposition de l'université. Hésitant d'abord quelques secondes la rouquine lui emboita finalement le pas tandis qu'une voix à moitié recouverte par des bavardages surexcités émanait des hauts-parleurs de l'établissement. Sunmi s'immergea parmi une foule d'innombrables étudiants : la plupart s'écartèrent pour la laisser avoir accès au premier rang d'un spectacle ridicule de... cochons. Elle constata avec effrois que nombreux de ses compatriotes étaient éparpillés dans l'immense salle, contemplaient ce même théâtre odieux et ne tarda pas à comprendre que c'était sa fraternité qui était visée par tout ce bordel. La coréenne chercha dans la foule des visages familiers ; Bonnie, Daeun, Haneul... Quelqu'un pour l'aider à savoir quoi faire pour arrêter ce truc. Mais elle ne parvenait qu'à repérer des jeopardizes tout aussi horrifiés et déboussolés qu'elle-même ou bien des étudiants pendus à leur téléphone afin de graver la moindre seconde de ce défilé de porcs grâce à leur appareil photo. « Un tonnerre d'applaudissements pour la majestueuse présidente des fils à papa Bae Boyoung » C'en était trop pour elle. Elle n'allait quand même pas rester là et participer à cette humiliation publique ! « C'est n'importe quoi ! » s'écria-t-elle soudainement. Son éclat de voix avaient fait se tourner plusieurs élèves ; la rousse se fraya un chemin parmi la foule pour s'éloigner de ce théâtre grotesque mais avant d'atteindre la sortie un deuxième nom la fit se figer. « Voici Park Jinhyun » annonça la voix alors qu'au même moment des grognements furieux de cochons se répercutèrent en échos dans toute la salle. Sunmi serra les poings et tenta un unique regard vers l'animal lui aussi vêtus de vêtements qui semblaient véritablement provenir du Jeo dont il portait le nom. Foutus Tsebes.

Une heure après la fin de ce défilé et la fuite des vandales, les professeurs avaient reprit le contrôle de l'école et s'étaient chargés de disperser les élèves pour qu'ils retournent à leurs occupations ordinaires. La rousse emblématique des Jeopardizes était allée monopoliser un des bancs dans la cours principale de l'école. Les écouteurs à nouveau vissés dans les oreilles et le portable entre les deux mains ; Boyoung et Daeun étaient en train de la mettre au courant dans des sms affolés de l'état pitoyable dans lequel se trouvait actuellement leur résidence. La coréenne avait beau ressasser cette toute histoire dans sa tête, il y avait un truc en particulier qui l'enrageait : si ces attaques n'avaient été préméditées que par ces crados de verts peut-être y aurait-elle accordé un peu moins d'importance – après tout, aucun des Jeopardize n'avait été assez dupe pour penser que leur dernière excursion chez les Tsebes resterait sans réponse. Mais ces attaques avaient apparemment un lien avec les Bluings et c'était d'autant plus rageant qu'elle n'avait jamais pensé une seule seconde à ce que l'alliance plus ou moins officielle des jaunes et bleus puisse être remise en cause. Pas tant que Kyubok en était le Président et encore moins alors que Syuhei occupait le rôle de vice-président... Elle se sentait personnellement agresser par ce retournement de situation. « Traitre. » le mot lui avait doucement échappé à l'instant même où son regard avait croisé l'espace d'une seconde celui du Président des bleus mais décida de continuer leur manège habituel ; l'ignorer en se replongeant dans la lecture de son dernier message reçu : « il y a une tête de cochon dans notre frigo ». Il ne lui en fallu pas d'avantage pour courir après Kyubok. Il était là. Et c'était la seule personne qu'elle avait sous la main qui avait un lien direct avec ces deux attaques immondes. La main de la Jeo se posa une seconde sur l'épaule du coréen juste avant qu'elle ne se poste devant lui. « T'es sérieux là ?!  » Exit les politesses de salutations. « T'as donné ton accord pour les aider à nous humilier ? » Elle avait à peine haussé le ton mais déjà des élèves semblaient être intéressés par eux. « J'aurais jamais cru ça venant des Bluings et venant de toi ! » Non, elle n'avait pas honte de revenir lui adresser la parole pour des histoires après des semaines de silence radio.

« Bien joué, Bok ! […] » … Elle avait fusillé du regard le vert qui était venu adresser une accolade et quelques mots de félicitation à Kyubok et, alors même qu'il s'éloignait déjà d'eux, le regard de la jaune n'avait pas quitté une seconde la silhouette du Tsebe jusqu'à ce qu'il disparaisse complètement à l'intérieur d'un des bâtiments de l'université. « Excuse-moi de trouver ça ni flatteur, ni marrant. » répondit-elle en attendant patiemment que Kyubok ait finit de s'esclaffer. Et à peine eu-t-il le temps de finir de rire qu'elle avait recommencé à lui faire  part de son indignation. Au milieu de la cours et aux yeux d'une bonne dizaine d'élèves qui avaient déjà senti le truc louche arriver lorsque la rousse des Jeopardizes s'était approchée du Président des Bluings. A Sunmi ça lui était égale mais elle ne rechigna pas lorsque Bok l’entraîna à l'écart histoire d'espérer un semblant de discrétion. « Bon écoute ! » lui avait-il de suite intimé. Il prit une profonde inspiration. Hum. Bizarrement elle comprit que c'était effectivement le moment de l'écouter sans l'interrompre. Et. Bah. Pour une fois – bon, non, en fait ça arrivait souvent – elle s'était presque senti idiote. Il entendait quoi par crise ? D'où elle faisait une crise ?! … La jeopardize garda le silence pour jauger le bluing d'un air suspicieux. Y avait que Syuhei pour ainsi oser essayer de lui clouer le clapet. Et généralement il y arrivait en plus. C'était mauvais signe. « Je... hum. » bafouilla-t-elle. Sunmi baissa pour la première fois les yeux. Un peu confuse. Ok, peut-être qu'elle avait fait une erreur en le blâmant directement pour tout. Mais, mais... Y avait quand même une putain de tête de porc qui l'attendait sagement dans la cuisine de leur fraternité. Et ils avaient brûlé la majorité des vêtements – qui devaient coûter plus cher que le taudis verdâtre qui leur servait de base – qu'elle avait laissé dans sa chambre là-bas ! Elle blâmait peut-être la mauvaise personne pour tout ça, oui. Mais plus que ce stupide défilé de cochons et que les dégâts de leur fraternité, c'était devoir dire au revoir à une alliance qu'elle appréciait qui l'énervait. Comment Bok avait-il pu accepter de leur tourner le dos pour s'allier à des … des tarés. Des tarés qui étaient allés jusqu'à kidnapper des jaunes et à en blesser. Elle aurait pu trouver Duk pour lui parler à lui comme l'avait suggéré Kyubok. Elle aurait pu, ouais... mais elle n'était pas stupide au point de ne pas craindre des représailles personnelles. Est-ce que c'était normal d'avoir peur de la sorte d'un Président de fraternité ? D'avoir peur d'être à son tour enchaînée à une chaise et battue ? Même avec de tels coups c'étaient encore sa fraternité à elle qui se coltinait l'image des grands méchants, la blague.  « … Et donc quoi ? Si je continue à faire « ma crise » tu demanderas à un de ces tarés de me kidnapper ? » Elle avait dit ça sur un ton sérieux et calme comme vraiment intéressée par la réponse alors qu'elle savait pertinemment qu'il ne ferait jamais ça. Même si leur relation venait d'obtenir le titre de plan cul d'un mois – qui devait sûrement faire échos à ses propres paroles idiotes lâchées il y a quelques mois. « On est sorti ensemble, le corrigea-t-elle, et puis tu veux dire quoi par « content de voir que j'existe encore pour toi », hein ? C'est toi qui est parti, pas moi ! » Elle se sentait obligée de lui rappeler que ce n'était pas elle qui avait mit fin à leur dernière discussion. C'était pas elle qui lui avait claqué la porte au nez sans lui laisser une chance de retirer ses propos.  « C'était pas seulement au Président des Bluings que je voulais m'adresser, c'était à... heu... » Heu... A quoi ? Un ex, un ami, un coup d'un mois, un copain ? C'était pas comme s'ils avaient officiellement rompu. Mais c'était pas non plus comme s'ils étaient encore ensemble. C'était pas comme si elle se sentait capable de dire que Bok était encore son petit ami mais elle ne se souvenait pas pour autant l'avoir déjà qualifié d'ex. Too complicated. « Laisse tomber. » conclut-elle finalement. « J'aurais pas du venir. » Ouais mais pourtant t'es là et t'as même pas l'audace de t'en aller.

« MAIS NON JE LAISSERAIS JAMAIS PERSONNE TE TOUCHER T'ES FOLLE OU QUOI ??? »  Elle n'avait pas pu refréner un petit sourire. Rassurée par quelque chose dont elle se doutait déjà. D'une petite envie de meurtre elle était passée en quelques secondes à une espèce de reconnaissance. Puis à une envie de hurler. « T'aurais voulu que je reste ? »  Oui, oui, oui. OUI ! Elle n'avait que ce mots là qui lui brûlait les lèvres. Oui, elle aurait voulu qu'il reste. Peut-être que ça se serait passé autrement, peut-être qu'au bout d'un moment, à force de crier, ils auraient fini par se calmer. Et peut-être qu'ils n'en seraient pas là. A finalement se rejeter l'un et l'autre la faute après plusieurs mois de silence. « Je pensais pas ce que j'ai dit... » La jeopardize n'avait pas imaginé une seule seconde qu'il ait pu oublier les quelques derniers mots qu'elle lui avait adressé lors de leur dispute. Ça n'était pas sérieux. « … mais t'as pas le droit de me reprocher de ne pas être venue te parler plus tôt ; t'es pas non plus venu me voir ! Et justement, si j'étais pas là devant toi maintenant, est-ce que tu serais venu ? … Je pense pas ! » Peut-être qu'avoir entamé la discussion par intérêt envers sa propre fraternité des jaunes c'était nul, mais ça restait un contexte idéal pour enfin briser le mur qui s'était forgé entre eux ! « … C'est bon, t'as terminé ? » Elle l'avait écouté en se forçant à garder sa bouche close pour ne pas l'interrompre. Ça avait été dur de ne rien dire en l'attendant lui rappeler – comme si elle en avait besoin – que, non, ce n'était pas elle la chef de sa fraternité. Et puis... Et puis peut-être, ouais, que les Jeopardize avaient été les premiers à déclarer ouvertement la guerre en s'infiltrant chez les verts mais c'était à force des multiples petits piques qui leur avaient été lancés depuis plusieurs mois. Mais qu'importe. La coréenne se rendait compte à présent que parler de sa fraternité n'était plus la priorité ; fallait mettre au clair  entre eux ce qui traînait depuis des mois. « … Laisse tomber ces histoires de fraternités. » abandonna-t-elle finalement. La rouquine venait de s'approcher de Kyubok d'un pas hésitant. C'était rare pour la Jeopardize d'hésiter autant sur ses gestes. On l'a connaissait tactile et surtout peu regardante sur les limites physiques à ne pas franchir pour éviter de mettre l'autre mal à l'aise. Mais encore un peu, elle s'était approchée jusqu'à ce qu'il n'y aient que quelques centimètres qui les séparent. Soulignons quand même le fait que Sunmi avait à peine hausser le ton depuis le début de leur conversation. Pour elle qui avait la fâcheuse tendance d'immédiatement se braquer et partir dans des trémolos en ré mineurs de Drama Queen c'était un petit exploit ! « Ça fait des mois que ça traîne autant en finir aujourd'hui, elle prit une profonde inspiration, ça arrive les disputes dans les couples mais on en est plus un... pas vrai ? On devait parler mais qu'est-ce qu'il y a dire de plus à propos de nous ? » Rien ! Ça faisait des mois qu'elle attendait que Kyubok vienne lui parler en premier. Sunmi s'était imaginée de nombreuses fois sur la possible évolution de cette fameuse discussion mais elle ne s'était jamais imaginer demander une confirmation officielle de rupture. Fallait se rendre à l'évidence, non ? C'était quoi la suite, là ? Y'en avait-il une au moins ? Apparemment non ! Et pourtant. Et pourtant...  En contradiction totale avec ses paroles, la rouquine se décida à briser intégralement la distance qui la séparait de Kyubok et à peine eut-elle à lever un peu les pieds pour atteindre ses lèvres dans un baiser confiant mais peu appuyé. Ce serait inutile de commenter cette logique typiquement féminine. A envoyer des signaux totalement opposés entre gestes et paroles. AH, LES FILLES.

Y a des fois où on se regarde agir en ayant l'impression que c'est une totale tiers personne qui nous dicte nos actions ; un peu comme des sims, en fait. Bah là, Sunmi venait tout juste de vivre l'un de ses moments de simsesques. Dans la continuité des choses quelqu'un avait cliqué sur parler sentiments → rupture pour se délecter du spectacle puis pour on ne sait quelle raison avait enchaîné par embrasser → embrasser dans la folie de l'instant puis la jeopardize avait soigneusement exécuté les ordres. Et elle qui s'était rendue compte à quel point tout ceci était illogique s'attendait à devoir faire face à des questions ou à un nouvel élan de Syuhisme de la part de Kyubok. Mais rien de ça ne se produisit, au contraire ! Kyubok réitéra un baiser avec plus de vigueur encore. Son ventre se noua jusqu'à presque lui en faire mal ; la sensation familière et lointaine de ses lèvres contre les siennes venait de créer un immense vide dans son esprit. Elle aurait pu continuer, en réclamer plus. Elle aurait voulu même. Mais au moment où sa main tenta de prendre une initiative le baiser prit fin.  « Tu vas me détesteeeeeeer...»  Sunmi s'attendait à ce qu'il lui dise qu'il venait de manger un truc très épicé et que d'ici quelques secondes elle aurait la bouche en feu. Elle s'attendait vraiment à quelque chose dans ce genre là mais certainement pas à ce qui allait vraiment suivre. Il avait une copine ! UNE COPINE ! Depuis combien de temps ? Pourquoi aucune de ses commères qui lui servaient accessoirement d'amies n'étaient pas déjà venues la prévenir ?! Elle s'éloigna d'un pas en arrière tel un automate puis ; croisement de bras sur la poitrine en position pas contente. « … Tu plaisantes ? » jugea-t-elle bon de demander au cas où. Parce-qu'avec Kyubok on pouvait être sûr de rien hein. Ça aurait pas été la première fois qu'une de ses blagues lui paraissent... pas très drôles. Ahem. Mais non, là, c'en était pas une. Et la situation qui lui semblait déjà très confuse n'en devenait que plus ridicule : tout ça pour ça ? C'est ce que semblait dire l’expression actuelle de l'étudiante. Pourquoi se donner la peine de discuter avec elle s'il avait déjà tourné la page ? Pourquoi éclaircir un truc datant d'il y a des mois si ça ne valait déjà plus rien maintenant ? Pfiouh. « T'aurais peut-être pu commencer par ça ! Ça nous aurait épargner cette discussion inutile et ces bai... enfin tout ça, quoi ! » Le mot baiser avait du mal à traverser sa gorge. Elle se sentait ridicule en ayant l'impression d'avoir perdu un quart d'heure de sa vie. Et énervée. Et envieuse qu'il ait trouvé quelqu'un alors qu'elle-même de son côté n'avait pas l'impression de pouvoir en faire de même. Mais surtout ridicule. Mais fallait quand même avouer que la situation l'était. Enfin non, pire même, la situation était on ne peut plus bluingueste. La jeopardize avait initié une tentative de rupture suivit d'un baiser. Le bluing avait réitéré le baiser avant de lui annoncer qu'il avait une copine. Bravo. Vraiment, bravo.  « … Et qui est l'élue ? Encore une grosse qui attend son heure gloire ? » lâcha-t-elle en esquissant un joli sourire.

Elle faisait preuve d'un peu de mauvaise foi avec sa remarque là. Mais la nouvelle l'avait totalement refroidie et donc elle s'était automatiquement renfrognée. Bon, c'est vrai qu'elle n'avait pas non plus de quoi crier au scandale ou à la tromperie mais... ça lui restait très bizarre pour elle d'imaginer Kyubok avec quelqu'un d'autre. La jeopardize tenta d'abandonner son air irrité en décroisant les bras de sa poitrine pour venir glisser ses mains dans ses poches... avant de constater qu'elle n'en possédait pas sur ce jean. Fail. Bon... du coup, l'étudiante ne savait pas trop quoi faire de ses mains, ni quoi dire. Ça aurait été malvenue de sa part de lui reprocher d'avoir reporter son attention sur quelqu'un d'autre. Sunmi n'était pas idiote au point de se voiler complètement la face sur le fait que c'était un peu – beaucoup – sa faute.  La seule chose qu'elle pouvait donc lui reprocher c'était de ne pas avoir mentionné ce détail plus tôt. Peut-être pas au milieux d'une explication sur un défilé de cochons mais au moins avant son baiser. Mouais. Son explication du pourquoi il n'avait pas mentionné cet élément l'avait aussi laissé une seconde avec une moue septique. Mais une fois le sous-entendu monté au cerveau un petit sourire vint étirer la commissure de ses lèvres. Zut ! Elle n'avait pas envie de sourire là. « arrêêêtes çaaa ! » avait-elle presque envie de lui crier même. C'étaient quoi ces signaux contradictoires qu'il lui envoyait à son tour ? Ça partait dans tous le sens et même si c'était elle qui avait lancé ce jeu ça allait un peu trop loin pour elle, là ! ... Oh, s'il savait comme c'était le brouillard total dans sa tête là ! C'était largement pire qu'avoir à choisir entre des plateformes et des stilettos pour accompagner une robe fourreau – drame personnel qu'elle avait déjà du surmonter à l'aide d'une brigade de filles. Sunmi avait l'horrible impression de se retrouver à nouveau dans la peau de la lycéenne paumée qu'elle fut jadis. Il n'y avait que lui qui était capable de la mettre dans un tel état. Et elle lui en aurait presque voulu pour ça. « On s'en fout de qui c'est ! On vient de s'embrasser, c'est pas ça qui compte ? J'sais même pas pourquoi je sors avec elle, en tout cas maintenant je sais plus. » Quoi ? Comment ça « on s'en fiche » ? Elle s'en fichait pas elle ! Il avait peut-être raison sur le fait que là, maintenant, c'était pas la chose qui comptait le plus mais N'EMPECHE qu'elle s'en fichait pas de savoir qui était cette « nouvelle copine ». Question de principes féminins. C'était sûr qu'elle oublierait pas d'envoyer deux-trois commères de sa fraternité sur le dossier un peu plus tard. « Mais tu sors quand même avec elle » pensa-t-elle même très fortement avec mauvaise foi. Bornée jusqu'au bout. « Oui mais... » commença-t-elle sans savoir où finirait sa pensée. Mais quoi ? Qu'est-ce qui la retenait de franchir à nouveau le pas ? HEIN ? C'était pas comme si elle piquait le copain d'une autre... enfin, si un peu. Mais c'était pas ça qui l'arrêtait d'habitude. Le principe de solidarité féminine ça n'était que du vent de toute façon. « C'est pas elle que je.. heu, enfin c'est pas toi, c'est pas pareil, elle est pas toi, et … Voila, c'est clair non ?? »  … Croyez-le ou non, c'était plutôt clair, en fait. Assez clair pour faire véritablement sourire la jeopardize même si ce même sourire s'effaça un peu alors qu'elle essayait de se concentrer pour suivre le raisonnement de Kyubok. Une ride de concentration entre ses sourcils légèrement froncés vint témoigner même de l'application de la coréenne à essayer de bien tout assimiler. Il y eu un blanc de quelques secondes une fois qu'il eu fini de parler. Un blanc qui rompit d'elle-même. « Non, tu peux pas partir. » avait-elle dit d'une voix claire et le plus sérieusement du monde. « … Enfin je veux dire, ne pars pas, corrigea-t-elle en se raclant la gorge, j'aurais du venir avant. Je voulais le faire m'enfin... j'ai pas – BIZARREMENT le son de sa voix devint presque inaudible pour terminer sa phrase – osé. » OUI. C'est que derrière son maquillage L'Oréal elle avait dissimulé l'angoisse de se prendre un vent. Ou un refus. Ou... Ou bref, n'importe quoi qui aurait pu mettre officiellement fin à leur lien rpg. « J'ai pas vu d'autres garçons... enfin, aucun ne... m'intéressait. » Allez, on inspire et on continue. « Enfin, j'ai l'impression qu'il n'y a que... toi, maintenant. » Et on expire. « Pour l'instant.» … On inspire, on expire et on évite de dire de la merde. « Enfin non pas « pour l'instant ». Je... bref, t'as compris. » abandonna-t-elle en soupirant. Oh, voilà que mademoiselle Prada buttait elle aussi sur les mots. C'était largement plus compliqué que dans les séries américaines qu'elle visionnait avec Eunnai ! Ils pouvaient pas genre juste mettre une musique pseudo-romantique, se regarder trente secondes dans les yeux avant de s'embrasser et commencer un nouvel épisode ni vu ni connu ? Allez, on tente. Après tout, les mots c'étaient pas le point fort de l'étudiante – en lettre et littérature s'il vous plait. Elle s'avança à nouveau vers Kyubok, ses mains vinrent se loger à l'arrière de sa nuque cette fois-ci ce fut à elle de venir franchir la rambarde de ses lèvres pour l'embrasser. Elle se pressa encore un peu plus contre lui et même une fois leurs lèvres séparées la rouquine ne se résolue pas à bouger. Tant pis pour les touristes qui passeraient par là et les verraient, tant pis pour sa fraternité et tant pis pour cette fille à l'identité encore inconnue. Elle était douée pour penser de manière égoïste, mais là, pour une fois, elle avait l'impression de le mériter. Collant son front contre celui du bluing, Sunmi releva les yeux vers lui en prenant un air presque sérieux. « … Mais je t'en veux quand même pour ces stupides cochons. » Bah oui quand même, voyons.