Rancunier... L'un des traits de caractère qui me définissait le mieux - si on mettait de côté le fait que je sois aussi quelqu'un de très têtu, bien sûr - Je n'avais pas adressé la parole à Areum, une seule fois, depuis ce jour où nous nous étions croisés en ville, par hasard, pour finalement nous quitter sur de mauvais termes. Une dispute de plus, m'étais-je dit... Mais, bizarrement, cette fois, ça avait été ce qu'on appelle « la goutte d'eau qui avait fait déborder le vase ». Habituellement, je n'y faisais pas vraiment attention ou alors ça passait au bout de quelques heures. Mais là… Disons que l'accumulation de prises de tête de ce genre, même si elles étaient minimes, commençait à peser lourd. C'est d'ailleurs pour cette raison que durant ces quelques derniers jours, j'avais tout fait pour passer le moins de temps en compagnie de la jeune femme. C'est aussi pour cette raison que, lorsque je découvris en me levant ce matin le mot qu'elle m'avait laissé, je n'y accordai que quelques secondes d'attention, las, avant de finalement glisser le bout de papier dans la table de chevet, en oubliant alors complètement la présence...

Deux ou trois heures s'écoulèrent et, finalement, je décidai de quitter la chambre d'hôtel, dans laquelle j'étais à présent seul, mes trois colocataires de chambres s'étant faites la malle assez tôt dans la matinée. Non pas que cela me dérangeait de me retrouver tout seul mais profiter du beau temps me ferait aussi le plus grand bien. Quittant ainsi la pièce, sans oublier de la fermer, je me dirigeai vers l’ascenseur tandis que, les yeux fixés sur mon écran de portable, je cherchais le prénom de mon meilleur ami. Cependant, une légère secousse m'obligea à relever la tête et mon visage se couvrit alors de ce masque d'indifférence qui, décidément, ne me quittait plus ces derniers jours, lorsque je vis qui était la personne qui venait de me bousculer. Détournant le regard après quelques secondes, je m'apprêtai à poursuivre mon chemin mais une légère pression autour de mon poignet m’interrompit dans mon geste... Tournant alors légèrement la tête, sans pour autant regarder la Jeopardize, je me contentai de lâcher un… « Oui, je l'ai lu... » avant de soupirer légèrement à ses derniers mots. « Bon, tu m'excuseras mais j'ai des choses à faire alors si tu n'as rien d'autre à dire... » L'incitant à me lâcher, j'appuyai sur le bouton de l’ascenseur qui, entre temps, s'était refermé. Fuir était ce que je savais faire le mieux, n'est-ce pas ?

Il faut qu'on arrête de se disputer, avait-elle écrit sur ce papier... Mais je n'avais pas demandé à ce qu'elle fasse la gueule, moi. Je n'avais pas non plus demandé à ce qu'on se quitte de cette manière. Les disputes, ce n'est pas moi qui les avait orchestré ces derniers temps. Je n'avais fait que les subir. Et le pire, dans tout ça, c'est que je ne savais même pas qu'elle en était la cause réelle... Ça me tombait dessus, comme ça, d'un coup, sans même que je ne le vois venir. Alors, oui... Elle pouvait s'en vouloir, pour le coup. Je n'étais pas du genre à rejeter la faute sur les autres, habituellement, mais là je ne me sentais aucunement concerné. Je n'avais rien à me reprocher... Par contre, j'en voulais beaucoup à la jeune femme. Raison qui m'avait, d'ailleurs, poussé à l'éviter pendant plusieurs jours et qui m'incitait à continuer sur cette lancée. Au moins, elle aurait une bonne raison pour sous-entendre que je n'étais qu'un lâche... Cependant, alors que je m'apprêtais à lui fausser compagnie, la Jeopardize me retint une nouvelle fois, prétextant ne pas avoir fini, avant de me bloquer l'accès à l’ascenseur. Laissant alors échapper un léger soupir dans lequel on pouvait déceler une pointe de frustration, je levai de nouveau la tête vers la jeune femme, avant de la regarder dans les yeux. « Ok... Je t'écoute...» m'exclamai-je finalement, devant l'insistance dont elle faisait preuve. Je glissai ensuite mes mains dans les poches de mon pantalon, las, et fit quelques pas en arrière jusqu'à finalement m'adosser au mur qui faisait face à l’ascenseur et donc à la jeune femme... « Mais abrège, s'il te plaît... » jugeai-je bon d'ajouter, pressé de quitter cet endroit.

Les minutes s'écoulaient et rien... Nada. La jeune femme n'avait toujours rien dit et moi je commençais à trouver le temps long. J'étais patient, habituellement, mais il y avait certaines choses pour lesquelles ma patience avait des limites. Et le fait de devoir attendre que la Jeopardize daigne enfin ouvrir la bouche en faisait partie. J'avais compris... Me parler était difficile. Mais je n'avais pas accepté de rester pour qu'on passe notre temps à nous regarder dans le blanc des yeux. Ou du moins, pour que JE passe mon temps à la regarder puisque mademoiselle ne m'avait pas adressé un seul regard depuis qu'elle m'avait bloqué l'accès à l’ascenseur. D'ailleurs, c'était une habitude chez elle de ne pas regarder les gens lorsqu'elle leur parlait ? Non parce que, c'était à se le demander... Mais soit. Pour en revenir au vif du sujet, je n'avais franchement pas que ça à faire et, bien que je n'en laissais rien paraître, cette situation commençait à devenir légèrement gênante. J'avais envie de partir, de la laisser planter là et pourtant... Quelque chose m'en empêchait.

Puis, finalement... Elle se mit enfin à parler. Bon, elle ne m'apprenait pas grand chose pour le coup et ne faisait que tourner autour du pot mais, au moins, elle s'était lancée. Cependant, ce n'était pas gagné... Et moi, de mon côté, je n'avais pas l'intention de lui rendre la tâche facile. J'avais déjà fait bien assez d'efforts en acceptant de l'écouter alors que je n'en avais aucunement l'envie... Fallait pas trop m'en demander, non plus. C'était méchant, ouais, mais il paraît que je l'étais alors... « C'est pas facile, c'est pas facile... Tu n'arrêtes pas de le répéter... J'ai bien compris que ce n'était pas facile. Mais je ne compte pas y passer la nuit... Alors, encore une fois, abrège ! » Les quelques derniers mots résonnèrent dans le couloir de l’hôtel et le ton froid que j'avais employé laissait parfaitement sous-entendre que tout cela commençait à m'agacer... Toutefois, je finis par laisser échapper un soupir et détournai finalement le regard l'espace de quelques secondes, avant de poursuivre sur un ton anormalement calme... « Écoute Areum... Je n'ai pas envie de me prendre une nouvelle fois la tête avec toi. Tu ne veux pas avoir à couper les ponts ? Alors remets toi en question... Tu étais la première à vouloir qu'on se réconcilie et, depuis, j'ai l'impression que tu fais tout pour que ça ne marche pas... » Je me stoppai, m'accordant une courte pause, et finis par ajouter dans un soupir... « Je ne te comprends pas. Et plus le temps passe, moins j'ai envie d'y parvenir... »

J'écoutais la jeune femme, le visage se voulant complètement inexpressif, alors que je tentais de garder mon calme. Non, on ne se prenait pas la tête. Pas pour l'instant, du moins... Mais si elle continuait sur cette lancée alors, oui, ça risquait fortement d'arriver. D'ailleurs, tandis que jusqu'à maintenant je l'avais écouté sans reprendre la parole, sans l'interrompre, je ne pus cependant m'empêcher de laisser échapper un rire quelque peu forcé à ses mots... Elle ne le faisait pas exprès ? Mauvaise réponse. Ce n'était pas une raison... Pas une raison valable en tout cas. Parce que si on commençait à aller dans ce sens, autant affirmer qu'on ne le faisait pas exprès à chaque fois qu'on faisait quelque chose qu'une autre personne n'appréciait pas. Ce n'était pas une raison, non... Et surtout, c'était trop facile de se défiler face à des explications en disant qu'on ne l'avait pas « fait exprès ». Autant ne rien dire du tout, en fait... Puis... Pourquoi m'avait-elle demandé de l'écouter si c'était pour, au final, ne rien me dire vraiment ? Pourquoi avait-elle engagé cette conversation si c'était pour me répéter sans cesse les mêmes choses et ne rien m'apprendre de nouveau ? Elle s'excusait ? Ouais, c'est ce que j'avais cru comprendre en lisant son mot, quelques heures plus tôt. Et ? Elle pensait qu'il suffisait de prononcer ces quelques mots pour que tout s'arrange ? « Excuse moi ? Tu veux que je t'excuse ? Tu dis toi même que tu ne sais pas si ce sera la dernière... » Et même si elle n'avait émis qu'une supposition, pour le coup, à l'entendre parler j'avais l'impression que c'était sûr et certain qu'une dispute éclaterait de nouveau. Simple intuition... « Alors à quoi bon ? Pourquoi t’excuser si c'est pour recommencer après ? » ajoutai-je, sans la quitter du regard. Puis, finalement, je finis par baisser celui-ci et, dans un murmure, je laissai échapper légèrement désespéré... « Peut-être que si tu daignais me regarder, au moins lorsque tu t'excuses, je pourrais être tenté d'y croire un minimum... » Parler sans regarder la personne n'était déjà pas génial, en soit, mais si en plus elle le faisait en balançant des excuses, c'était un coup à ce que le destinataire de ces dernières n'y voit rien de crédible.

Si je trouvais ça drôle ? Savait-elle faire la différence entre un rire sincère et un rire forcé ? N'avait-elle pas remarqué que mon rire était tout sauf authentique ? Qu'il n'avait résonné dans le couloir que dans le but de témoigner toute la frustration qui me rongeait et qu'à défaut de pouvoir lui crier dessus, j'avais préféré laissé échapper ce rire rempli de nervosité ? Puis merde... Je ne pouvais pas rire et quand je parlais ça n'allait pas non plus... Je devais faire quoi ? Pleurer ? Et puis quoi encore... ?! Levant les yeux au ciel, non sans laisser échapper un soupir, je me gardai de répondre à la Jeopardize lorsque cette dernière jugea bon de m'expliquer, à sa façon, que la vie était loin d'être rose et qu'on ne pourrait pas tout le temps s'entendre sur tout. Franchement... A quoi bon lui répondre ? Le feu avait déjà bien pris, je n'allais pas rajouter de l'huile dessus... De toute façon, la jeune femme s'en chargeait déjà très bien toute seule... J'étais parfaitement conscient qu'on ne pouvait pas s'entendre tout le temps, qu'il y avait certains moments pendant lesquels nous ne serions pas forcément d'accord... Je ne faisais que reprendre ce que la jeune femme avait écrit sur son bout de papier. Il faut qu'on ARRETE de se disputer... En employant ces mots, n'avait-elle pas fait part de son envie de ne plus avoir à se prendre la tête avec moi ? Oui, c’est bien ce qu'elle avait écrit, je ne devenais pas idiot... Donc, on est d'accord ? Elle se contredisait elle même en disant maintenant que c'était chose impossible. Tss... Je vous jure... Elle allait vraiment finir par me rendre fou. Et pas dans le bon sens... Je fais de mon mieux, disait-elle... C'était la meilleure ça... Pour l'instant, elle n'avait presque rien fait, si ce n'est me rabâcher encore et toujours qu'il y avait bien quelque chose mais qu'elle ne pouvait pas m'en parler dans l'immédiat. Alors quoi ? Pourquoi m'as-tu retenu, si tu n'es pas prête à me dire ce qui te rend si... tête à claques ? « Il faut toujours que tu exagères les choses, c'est incroyable... » Et chiant, surtout. Quand avais-je dit que je ne voulais plus la voir ? Quand avais-je dit que sa présence m'était insupportable ? Okay, ces derniers jours, je l'avais évité. Okay, elle était la personne avec laquelle je voulais le moins passer de temps, là, maintenant. Mais je n'avais jamais dit que je voulais qu'elle disparaisse de ma vie. « Plus clair que je te dise ce que j'attends ? Mais, je n'attends absolument rien de toi, Areum... C'est toi qui n'arrête pas de te faire des idées... Que je sache, je n'ai à aucun moment dit que je ne voulais plus de ta présence à mes côtés. De toute façon, avec toi, c’est tout le temps la même chose... Tu vois, ça recommence ?! Tu étais censé t'expliquer et, au final, c'est moi qui parle. C'est une sale manie chez toi de toujours te poser en victime, non ? » J'avais dit tout cela sur un ton calme. Peut-être que c'était pire, en fait. « Je n'ai rien dit, Areum... Je n'y ai même pas songé une seule fois. Alors ne me fais pas dire ce que je n'ai pas dit. » Je laissai finalement échapper un faible soupir après avoir terminé ma phrase... Cette conversation ne nous menait à rien. On tournait en rond...

Franchement, elle m'exaspérait. M'avait-elle écouté jusqu'au bout au moins ? C'était à se le demander... « Laisse tomber... De toute façon, tu n'entends que ce que tu veux bien entendre. » A quoi cela servait de discuter avec elle si la moitié de mes paroles passaient à la trappe ? Cette fichue dispute et ces excuses qu'elle s'évertuait à me rappeler avoir faites n'étaient plus ma préoccupation première. Je n'en avais que faire, à présent... Tout ce que je voulais, c'était des explications. Des explications quant à son comportement, quant à ses agissements. Pourtant, au lieu de ça, j'avais eu droit à ce qu'on pouvait assimiler à des plaintes. Des plaintes de la part de la jeune femme dans lesquelles elle remettait en question la place qu'elle occupait dans ma vie… Alors oui, elle se posait en victime. Oui, elle tentait à chaque fois de me faire passer pour le méchant. Le méchant qui, soit disant, n'en avait rien à faire d'elle. Le méchant qui ne se sentait pas concerné et qui, apparemment, ne rêvait que d'une chose : qu'elle disparaisse de sa vie. Si ça ce n'était pas se poser en victime, c'était quoi au juste ? Quand je disais que cette conversation tournait en rond... Et ça risquait de durer encore longtemps si elle ne faisait pas un peu plus d'efforts de compréhension. Tout comme cela risquait de s'éterniser si elle continuait de rabâcher encore et encore les mêmes choses... « Arrête ça, Areum... Vraiment, arrête... » Elle parlait mais elle parlait pour ne rien dire et cela avait le don de m'agacer plus que je ne l'étais déjà. On perdait notre temps... Elle m'avait demandé de rester, de l'écouter parce qu'elle avait des choses à me dire mais elle ne me disait rien de plus que ce que je savais déjà. C'était presque du foutage de gueule, à ce stade, non ? « Si tu ne sais plus quoi faire et puisque visiblement tu n'as rien d'autre à me dire, je peux partir, maintenant, non ? » Je croisai les bras sur mon torse et fixai la jeune femme, toujours adossé contre le mur, attendant une réponse. Puis, finalement, voyant que celle-ci tardait à venir, je fis quelques pas en avant, appuyant une nouvelle fois sur le bouton de l'ascenseur. Fallait pas me prendre pour un con... Je détestais ça, et ce, encore plus quand c'était une personne que j'appréciais qui se le permettait. Elle ne faisait aucun effort alors pourquoi devrais-je en faire ? J'en avais déjà fait bien assez et, apparemment, cela ne semblait pas être quelque chose qui devait se faire dans les deux sens pour elle, alors...

Elle m'énervait... Non, en fait, le mot n'était pas assez puissant. Un sentiment beaucoup plus fort que l'énervement me tiraillait, en ce moment. Je bouillonnais intérieurement et ce n'était pas peu dire. Je vous jure... Et je prenais vraiment sur moi là pour ne pas exploser. Je n'en avais pas envie. Et il ne valait mieux pas, en fait, parce que j'étais capable de dire des choses qui pourraient complètement dépasser ma pensée si je le faisais. Et ce n'était pas le but, pas vrai ? Bien sûr que non... Laissant donc échapper un long soupir dans lequel on pouvait certainement deviner toute la colère qui m'animait, je détournai le regard l'espace de quelques secondes et fis un faible pas en arrière, quand encore une fois la jeune femme me barra le passage de son bras. Je finis ensuite par reporter mon attention sur elle et mon visage, jusqu'alors inexpressif, laissait à présent totalement deviner que la situation m'agaçait, même si mes paroles l'avaient très bien fait sous-entendre précédemment. La jaune était en train de me pousser à bout. En était-elle consciente là ? Et plus les mots s'échappaient de sa bouche, plus les traits de mon visage se faisaient durs. Elle voulait que je parle ? D'accord, j'allais parler... « Pourquoi je ne peux pas comprendre ? Tu me le demandes vraiment ? » demandais-je alors, avant de laisser échapper un léger rire teinté de nervosité. Puis, sans lui laisser le temps de me répondre, je l'obligeai une nouvelle fois à lâcher mon poignet avant d'ajouter sur un ton désespéré... « Mais bon sang, Areum... T'es idiote ou tu le fais exprès ? Comment veux-tu que je te comprenne alors que tu ne m'en donnes pas les moyens, hein ? » Je levai les yeux au ciel, avant de fixer de nouveau la Jeopardize dans les yeux. « Je ne sais pas... Je ne sais pas pourquoi tu agis de cette manière, ni même pourquoi c'est difficile pour toi de t'exprimer en ce moment. Alors comment veux-tu que j'arrive à comprendre ? Tu me dis que certaines choses te tracassent mais qu'il est impossible pour toi d'en parler dans l'immédiat... Okay, d'accord. Mais si tu n'es pas prête à me dire ce qui ne va pas, ne me demande pas de l'être et d'essayer de te comprendre. Les efforts, ce n'est pas seulement à moi de les faire... Tu as besoin de plus de temps ? Très bien... Prends tout le temps qu'il te faudra mais ne t'attends pas à ce que je me montre compréhensif, alors que toi tu n'es pas prête à faire des efforts de ton côté... » Je lui tournai finalement le dos, pendant quelques secondes, soufflant afin de reprendre mon calme mais... Plus facile à dire qu'à faire. Pourtant, au bout d'une bonne trentaine de secondes, je finis par y parvenir et, sur un ton un peu plus bas bien qu'on pouvait toujours y déceler de la colère, je décidai de poursuivre... « Tu sais quoi, Areum ? Tu m'énerves... Ton comportement m'énerve. Voila pourquoi je suis en colère contre toi... » Je me tournai de nouveau vers elle, lui faisant une nouvelle fois face et ajoutai alors... « C'est bon, tu as les réponses à toutes tes questions ? Elles te conviennent, tu as tout compris ou alors tu veux que je me répète ? »

« Bien... » répondis-je, tout simplement à la jeune femme, lorsque celle-ci passa près de moi avant d'aller se réfugier dans la chambre. De toute façon, il n'y avait pas grand chose à dire, pour le coup. Alors, certes, j'y étais allé un peu fort, je pouvais le concevoir. Mais, apparemment, il semblait qu'il fallait agir de cette manière pour que la jeune femme comprenne un minimum. Quoique... Je me demandais tout de même si cela serait suffisant. Je n'avais pas l'impression que la Jeopardize soit prête à se remettre en question et, à mon avis, ça ne viendrait pas de si tôt. Question de fierté, certainement... On était pareil, elle et moi, sur ce point. Sauf que, pour le coup, c'est sûrement sans prétention que je pouvais affirmer que ces derniers temps j'avais fait assez d'efforts et que, bon nombre de fois, j'avais mis ma fierté de côté pour ses beaux yeux. Elle voulait qu'on remarque les efforts qu'elle fournissait, elle, mais elle n'était apparemment pas disposée à voir ce que les autres faisaient pour arranger les choses. Si là était sa conception de « l'amitié » alors tant pis... Que vouliez-vous que je vous dise ? Le temps changeait énormément les gens, et ce, parfois en mal. J'en étais la preuve vivante, d'ailleurs... Mais elle... Elle aussi elle n'avait pas été épargnée. Elle était devenue ce genre de filles que j'avais longtemps détesté et que je continuais de ne pas supporter. Fifilles à papa, petites princesses... C'est fou ce que l'argent pouvait faire des gens. Très paradoxal que je tienne de tels propos, n'est-ce pas ? Sauf que, contrairement à la plupart des gosses de riche, je me comportais de cette manière de façon volontaire, juste par envie de faire chier mon monde. Eux, ils étaient comme ça. C'était ancré en eux, et ce, bien profondément. Je ne me considérais pas comme faisant partie des leurs et seuls les personnes qui me connaissaient un tant soit peu savaient que je n'étais pas comme eux. Elle me demandait de la comprendre mais, elle, elle ne comprenait rien... Et elle ne cherchait pas à comprendre, visiblement. Pourquoi étions-nous devenu amis, il y a une douzaine d'années ? Pourquoi m'étais-je attaché à elle ? N'étais-ce pas justement parce qu'elle était différente des autres ? Je ne lui demandais pas de changer à nouveau. De redevenir celle qu'elle était avant. Je n'en avais pas le droit dans la mesure où moi-même j'avais beaucoup changé aussi. Ce serait tellement égoïste de ma part si je me le permettais. Mais... En fait, je voulais qu'elle comprenne, elle aussi... Aujourd'hui, elle était devenue comme eux. Comme toutes ces personnes que je ne pouvais décidément pas me voir en peinture. Pourtant, j'avais fait beaucoup d'efforts pour supporter son comportement parfois, et ce, dans le but de donner une chance à notre relation… J'avais fait énormément de concessions à ce niveau et elle n'avait même pas été capable de le voir, de le comprendre. Alors pourquoi devrais-je faire l'effort de comprendre, moi ? De comprendre quelque chose que je n'étais pas en mesure de comprendre, qui plus est ? « Je réagis de cette manière, je ne peux pas te dire pourquoi mais comprends moi quand même, ok ? » C'était quoi comme genre de demande, ça, au juste, hein ?