Ses lèvres se pincèrent dans une expression inquiète alors qu'il posa son stylo sur la table, cessant un instant de griffoner sur sa feuille pour lancer un regard las par delà la fenêtre. Sul Li ne cessait de s'imposer à son esprit pour le torturer encore plus, et s'il n'était pas un homme fier et résistant, voilà longtemps que le jeune professeur aurait fondu en larmes. Non pas qu'il n'avait pas l'habitude des élèves difficiles, voires quasi inexistants - Ne parlons même pas de celui-là, au fond de la classe, dont il ignorait encore le nom -, mais, sans doute par favoritisme, il ne supportait pas que la tsebé soit de ce bord. Sans doute que, si Young Ja n'avait jamais croisé sa route quelques années plus tôt, il aurait pu s'en moquer comme de la dernière saison des pluie, mais ça n'était pas le cas, et le soupire qu'il poussa en fut la preuve. Voilà longtemps qu'elle accaparait toutes ses pensées, et aujourd'hui ne fut pas une exception. Elle manquait tant de cours qu'il en était contraint à la convoquer pour espérer voir son joli visage. L'avait-elle oublié ? Se moquait-elle de tout ce qu'ils avaient vécu, de ses sentiments ? Ou bien la rancoeur était-elle trop grande pour être effacée par le temps ? L'enseignant ne trouvait aucune réponse à ses questions, et riva à nouveau son attention sur l'écran de son portable pour s'enquérir de l'heure. En parlant du loup : l'ancienne idole, à condition qu'elle ne se soit pas décidé à le snober une fois encore, ne tarderait pas à passer son joli minoi par la porte. Mais en attendant, il se pencha à nouveau pour passer à la copie suivante. Son coude posé sur le bureau, le menton dans le creux de la main, son stylo dansait avec aisance. Puis, inconsciemment, lorsqu'on toqua à la porte, il ne put s'empêcher de se redresser avec une lueur d'espoir, passant une main dans ses cheveux d'ébène. « hm ? »

La vie était injuste. Les gens étaient mauvais. Sul Li avait fini par ne croire plus qu'en ces deux phrases. Elle avait son entourage proche, constitué de quelques personnes, et elle s'était refermée au reste à part en quelques occasions particulières. Oh, elle sortait, faisait de nouvelles connaissances, mais ne s'accrochait plus à personne. Trop dangereux, définitivement trop dangereux, et surtout trop douloureux. Son scandale avait aussi sonné la fin de son couple avec Hyeong Su, la fin de son amitié avec Young Ja... En ce qui concerne Hyeong Su, elle s'en était remise, difficilement mais elle s'en était remise. Pourquoi ? Parce que lui, malgré tout, n'avait pas voulu arrêter de la fréquenter, au contraire. Il avait désobéi à son manager, avait même manqué de détruire sa carrière en la défendant à de nombreuses reprises en public, et c'est pour cette raison d'ailleurs que Sul Li avait décidé de rompre avec lui, d'un commun accord, afin de ne pas le voir sombrer de la même manière qu'elle. Tae Yang, quant à lui... Eh bien, il avait tout simplement refusé de ne plus la fréquenter, et avait alors été là tout le long, refusant même ses conseils d'être plus discret. Young Ja... Young Ja, celui sur lequel elle comptait le plus, quant à lui... Avait tout simplement agi comme si elle avait cessé d'exister. Les rôles s'étaient inversés aujourd'hui.

Vêtue d'un sweat et d'un short – elle pouvait se le permettre vu que son corps était toujours celui d'une danseuse... donc fait au photoshop (aa) – elle toqua à la porte avant d'entrer, lançant un « Bonjour. » froid, accompagné d'un mouvement de tête, uniquement pour être polie, avant d'aller s'asseoir face à lui. Sa tenue s'expliquait par le fait qu'elle ne comptait, de toute manière, pas assister au cours d'histoire qu'il donnait et qu'elle allait, comme à son habitude, à la salle de danse à la place. « Vous souhaitiez me voir ? » Son ton n'avait toujours pas changé. Froid, cassant, alors que chacun de ses regards le fusillait. Le temps n'avait pas pansé ses plaies. Et en réalité, son retour empirait les choses plutôt que de les arranger. A chaque fois qu'elle le voyait, c'est comme si on venait remuer un couteau dans sa plaie franchement découverte.

Lorsqu’elle eut frappé à la porte, son cœur cessa un instant de fonctionner, comme si l’engrenage avait déraillé, avait failli. Confronté à ses anciens démons, à son ancienne démone, arriverait-il à garder la face et un minimum de crédibilité ? Il ignorait si la jeune femme le fuyait lui, ou ses cours, bien qu’il ai une idée judicieuse de la réponse, mais l’un revenait inexorablement à l’autre, et à peiner son âme. Avec un professionnalisme rare, Young Ja ravala son espérance de la voir en cours dans une telle tenue et, loin d’être idiot, se douta bien qu’il n’aurait pas la chance de l’avoir en classe aujourd’hui encore. S’évertuait-elle à s’éloigner de lui, mettait-elle un si grand point d’honneur à cela ? Son regard suffit à toute réponse. Autrefois, elle avait été avec Sun Nah son pilier le plus précieux, celui pour qui il se serait damné et tué, et aujourd’hui il mourait bel et bien de sa main, sous ses regards. Mais il ne pouvait extérioriser les choses ainsi alors qu’il était seul fautif, il ne pouvait décemment pas se pendre à ses pieds et joua plutôt sa carte, chargeant son regard charbonneux d’une neutralité sans faille : « Mademoiselle Ahn, êtes vous seulement consciente que j’ai un programme à terminer avant la fin de l’année ? » Il n’avait jamais été bon acteur, et ignorait alors jusqu’à ses capacités d’un tel jeu. Son stylo se posa sur la copie qu’il corrigeait alors que le professeur détourna son attention sur l’heure affichée sur l’écran de son téléphone. « Trois minutes de retard. La ponctualité n’est-elle plus un de vos enjeux principaux ? » Cette allusion, il n’avait pu s’en empêcher : tout comme il ne pouvait s’empêcher de croire qu’un jour, elle cesserait de le mitrailler ainsi du regard, tout comme il ne pouvait s’empêcher d’espérer la voir briller à nouveau.

Un programme à terminer d'ici la fin de l'année ? Etait-il sérieux ? Parce que cela donnait plus envie à la jeune femme de rire qu'autre chose. Un programme à terminer d'ici la fin de l'année. Et en quoi cela avait-il un rapport avec elle ? Puis, ce ton neutre, ce regard... A vrai dire, elle peinait même à se sentir mal à l'aise puisque, de toute manière, elle ne reconnaissait pas le Young Ja qu'elle connaissait. Ah, mais, attendez. Qu'elle était bête. Le Young Ja qu'elle croyait connaître n'avait jamais existé en réalité. Dixit la manière dont il l'avait lâchement abandonnée. Enfin bref. Elle se contenta de lui répondre d'un ton toujours aussi monotone, ne cachant pas son désintérêt total. « Je ne vous empêche d'aucune manière de terminer votre programme, monsieur Baek. Je ne crois pas que le fait que je sois présente en cours ou non change quelque chose au déroulement de votre cours, ou même à votre salaire. » Le salaire.. De toute manière, c'est bien ce qui l'intéressait. L'argent, non ? Il n'en avait rien à faire des sentiments des autres. Il ne s'en souciait pas. Mais le pire fut sûrement la suite. Lorsqu'il l'attaqua sur sa ponctualité. Une telle pic ? Impossible de ne pas y réagir. Furieuse, elle reporta vivement son regard sur lui, commençant à perdre son calme. Et cette fois-ci, son ton fut plutôt accusateur, ayant perdu de sa neutralité. « Et pourquoi le serait-elle encore ? Je n'ai plus de rêve à réaliser comme dans le passé. Alors ma ponctualité n'a plus lieu d'être. Et, si nous sommes là pour discuter ma ponctualité, je crains fort de ne pouvoir contribuer à cette échange pendant très longtemps encore. »

Poupée de porcelaine, voilà longtemps que tout d'eux avaient appris à le devenir. Des êtres semblant être dénués de sentiments lorsqu'ils désiraient paraître ainsi, une manière de cacher leurs pensées profondes. La neutralité de sa voix était la pique de la pire espèce pour le professeur qui songeait alors qu'être fusillé du regard aurait été une torture plus douce. Savoir qu'elle était peinée de le voir était, d'une manière ou d'une autre, avouer que la vue de Young Ja avait encore de l'effet sur elle. Et pourtant, bien vite regretta-t-il ses pensées. La ponctualité déclencha chez la ravissante interlocutrice de l'homme un raz-de-marée ardent qui eut tôt fait de le mettre mal à l'aise. « Je ne suis pas le genre d'homme à avoir besoin d'un salaire de professeur pour assurer mes fins de mois. Seulement, je place ma fierté dans mes étudiants, et dans leur réussite, ainsi j'ose espérer que vous aurez au moins.. qui sait avec beaucoup de chance.. Le quart de la moyenne de la classe cette fois-ci, plutôt qu'un zéro pointé ? » L'homme perdait ses moyens, et se renfermait dans une bulle afin de ne pas être esquinté davantage. Afin de se divertir, afin d'annihiler ce flot de désespoir qui ne tarissait point en lui, il reprit une nouvelle copie sur laquelle il corrigea une, deux, puis trois questions de connaissance. « Je refuse de croire qu'une personne comme vous puisse vivre sans rêve. » Avoua-t-il avec une pointe d'espoir, sans pour autant relever la tête. « Ahn Sul Li, je ne suis là ni pour votre ponctualité, ni pour mon salaire. Tachons de passer aux choses sérieuses : j'ose espérer que vous comprendrez que beaucoup de choses dépendent de votre réussite universitaire ? Exposons les choses plus simplement. C'est ou bien deux heures en ma désagréable compagnie le jeudi.. » Young Ja n'était pas naïf, ou du moins ne l'était plus, et ne se faisait pas d'illusions : pour la jeune femme, sa présence devait être aussi nuisible que celle d'un insecte. Si seulement il n'avait pas été lâche de par le passé. « Ou bien quatre par semaine, sachant qu'en considérant votre état d’échec scolaire je suis tout à fait en droit d'imposer ces cours de soutient. » Faux. Il ne pouvait s'imposer. Mais il ne pouvait s'empêcher de croire qu'elle serait crédule.

Il n'était pas le genre d'homme à avoir besoin d'un salaire de professeur pour assurer ses fins de mois ? Chanceux qu'il était. Parce que de son côté, il en était tout autre. Elle était réduite à travailler comme femme de ménage chez un gangster, et à jouer aux accompagnatrices pour ce dernier pour arriver à subvenir à ses besoins, n'ayant plus la possibilité d'exercer le métier de ses rêves pour cela. Quelle chance, n'est-ce pas ? Puis, la réussite de ses élèves... Mais quelle réussite attendait Sul Li au juste ? Un diplôme ? Un poste de professeur de philosophie au mieux, de libraire sinon ? Elle ne survivrait pas deux jours. Pas deux jours, car son tempérament était aux antipodes d'un tel travail. Toute la neutralité de la jeune femme avait été soudainement remplacé par une sorte de fureur. Oui, la fureur d'oser même mettre sur le tapis, indirectement, un tel sujet que celui de ses principes, et par conséquent, de sa carrière, de ses rêves. Une personne comme elle, vivre sans rêves... Elle en avait bien un. Remonter un jour sur scène. Mais elle peinait à croire que cela se reproduirait réellement, étant donné le point auquel sa carrière était entachée. Alors elle se contentait donc de raccourcir en disant qu'elle n'en avait pas. Qu'elle n'en avait plus. « Pardon ? Beaucoup de choses dépendent de ma réussite scolaire ? … Dans le passé, jamais rien n'a dépendu de ma réussite scolaire. Lorsque je suis entrée dans une agence, lorsque je suis devenue trainee, ce n'était clairement pas pour mes compétences scolaires. » Puisque le passé avait était remis à ce point sur le tapis, autant aller jusqu'au bout, non ? De toute manière, désormais elle bouillonnait. Elle bouillonnait à un tel point qu'elle ne pouvait tout simplement pas s'en empêcher. Et son ultimatum ne fit qu'empirer les choses. Il tentait de lui faire du chantage ? Du chantage ? Mais pourquoi tenait-il tant au juste à la voir présente aux cours ? Elle ne comprenait tout simplement pas. Néanmoins, décidée à ne pas perdre la face, le fixant toujours, elle lui répondit de sa voix la plus assurée : « Imposer un cours de soutient ? L'imposer ? C'est une blague, là ? Je ne viens pas à vos cours, qu'est-ce qui vous ferait croire que je viendrai à des cours particuliers, hein ? »

Si Young Ja tenait à la voir tant présente à ses cours, cela n'avait rien de théoriquement scolaire. Oh bien sûr, savoir qu'elle suivait tous ses cours avec sérieux, et notamment les siens, le ravirait, non seulement en tant que professeur mais aussi dans son rôle d'« Oppa » bien que lointain. Disons plus clairement que si le jeune professeur était si à cheval sur ceci, c'est seulement car Sul Li seule avait la capacité d'éclairer ses journées et surtout ses cours bien trop monotones lors de ses absences répétées. Elle l'avait fait captif, elle régnait en maîtresse invétérée dans son cœur, et si son rôle en était encore flou, il se savait totalement chien. Et lorsque, encore une fois, elle fit acte du passé, un poignard invisible fondit en sa poitrine, le forçant à réprimer un cris de douleur qu'il étouffa en serrant les dents. Se pensait-elle seule à souffrir ? N'était-elle plus assez observatrice, ou alors compatissante, pour comprendre qu'il avait sombré en même temps qu'elle, à cause d'elle ? Sa dépendance à la drogue en avait été une des preuves directes. Son addiction lui permettait d'oublier qu'elle lui manquait affreusement, plus que toute autre personne alors. Il ne put alors plus en supporter. Young Ja était patient. Mais il avait des limites. Young Ja était résistant. Mais il avait aussi des faiblesses. « Etant donné que vous n'êtes plus dans votre domaine de prédilection, Mademoiselle Ahn, vous apprendrez qu'aujourd'hui seuls 8.1% des diplômés sont au chômage. J'ose espérer pour vous que vous avez pour ambition de ne pas finir sans emploi ? » D'un professionnalisme affolant pour une personne comme Young Ja qui avait connu la scène et côtoyé les émissions quotidiennement, le professeur darda un regard de glace sur la belle étudiante. Il fallait à tout prix qu'elle cesse d'évoquer le passé, quand bien même ce fut lui qui eut inconsciemment commencé. Les deux inséparables de la scène, le couple le plus glamour de l'année, ceux qui en avaient gagné des prix, dans un tête à tête dans les rôles de l'enseignant et de l'élève. N'était-ce pas digne d'un drama ? « Comment vous expliquer encore plus précisément que ça.. disons que vous n'auriez guère le choix. Je ne prendrais pas de risques inutiles en vous confiant là où je sais pertinemment que vous ne viendrais pas. Je viendrais chez vous. Est-ce utile de stipuler que vous n'êtes évidemment pas en position de refuser ? Je suis en possession du pouvoir de faire pencher la balance en ma faveur. J’espère que dorénavant vous serais plus encline à réfléchir à cette proposition ? » Dans un sourire glacé, le professeur insista. Elle avait voulu jouer cet étrange jeu de l'élève rebelle ? Qu'à cela ne tienne, Young Ja répliquerait en enseignant sévère. « Qu'importe, vous n'avez plus le choix. Je pense que ces quelques heures par semaines seront bien plus efficaces. »

Observatrice ? Elle ne l'était pas vraiment. Mais compatissante, oui. Elle aurait compati, oh oui qu'elle aurait compati, volontiers. Or Sul Li pensait dur comme fer qu'il n'en avait rien à faire d'elle. Autrement, elle n'arrivait pas à justifier son comportement dans le passé. Il s'en fichait totalement d'elle, n'en avait rien à faire d'elle, ne l'aimait pas et ne l'avait jamais aimée. Tout n'avait été que comédie, comédie et encore comédie. Oui, elle pensait que toute leur relation avait été fausse, du début à la fin. Qu'il n'avait jamais vraiment été ce Oppa qu'elle avait apprécié tant. Voilà pourquoi elle agissait ainsi. Voilà pourquoi elle tentait de paraître si neutre, si détachée. Alors qu'en réalité, il n'en était rien, et que le simple fait de le voir suffisait à raviver sa blessure, comme au premier jour. Finir sans emploi... Se retrouver au chômage... Elle se contenta de laisser échapper un petit rire. Un rire amer. De toute manière, cela ne l'étonnerait même pas. « Malheureusement, nos aspirations et nos attentes ne correspondent pas toujours à la réalité, car la vie est bien injuste. Alors ça ne m'étonnerait pas que je me retrouve au chômage. » qu'elle finit par lui dire. Pessimiste ? Largement. Elle avait été optimiste dans le passé, et cela ne lui avait pas réussi. Voyez où elle en était. Et puis, Young Ja... Comment avait-il fait pour devenir cet homme ? Si froid et... Professionnel ? Enfin... Comment avait-il fait, plutôt, pour lui cacher sa véritable nature ? Voilà ce qu'elle se posait comme question alors qu'elle l'entendait lui dire qu'elle aurait à subir des cours particuliers en sa compagnie. Oui, subir. Une véritable punition. Si elle ne venait pas à son cours, c'est parce qu'elle souhaitait l'éviter, ne pas le croiser, ne pas le voir histoire de ne pas se sentir encore plus mal. Or voilà qu'il allait la forcer à passer quatre heures par semaine en sa compagnie. Sans aucune chance de le fuir. Chez elle qui plus est. Furieuse, et à bout de nerfs, elle finit par retirer violemment son sweat, le dézipant et... Manquant de le lui lancer dessus dans sa colère noire. Mais elle se contenta finalement de le garder dans son poing, qu'elle serrait fortement, avant de lui tourner le dos puis de le balancer à l'autre bout de la classe, afin de se calmer. « Vous perdez votre temps, monsieur Baek. Vous le comprendrez bien assez tôt. »

Pessimiste, elle l'était et l'avouait sans mal de par ses propos. Pessimiste, lui aussi l'avait été au moment où tout lui avait échappé. L'agence l'avait clairement mis en garde : toute forme de contact avec Sul Li risquait de faire éclater un nouveau scandale qui signerait surement la fin du boysband. Young Ja n'avait pas souhaité mettre en péril le rêve de ses partenaires pour une relation douloureuse brisée. Qu'était-ce qu'un si lourd sacrifice, tant que les cinq autres pouvaient sourire à nouveau ? Il avait mis un temps considérable avant de comprendre qu'il fut le seul lâche de l'affaire. Tout s'était rapidement enchaîné : la chute du groupe, mis en hiatus pour conserver l'espoir des fans, les pleurs de ceux qui avaient si durement travaillé pour en arriver là.. Pessimiste, il n'avait pu que l'être. Toutefois, Young Ja, s'il était passé par des sommets d'incertitudes et de faiblesses, avait repris du poil de la bête. Voyez-le aujourd'hui. Pouvait-il concrètement se plaindre ? L'enseignant été apprécié pour sa valeur, et non pas pour son image. Il avait également une petite-amie magnifique et haute en couleurs, un métier stable, un appartement moderne, une vie bien remplie. Pourquoi l'étudiante se bornait-elle à se laisser noyer dans ces sombres pensées ? « Ahn Sul Li, la vie est injuste mais elle a ses bons côtés. Il faut seulement savoir saisir les bonheurs les plus simples et les comprendre. » Ceci n'avait été guère dur pour Young Ja : élevé dans une famille modeste, de faible constitution, on lui avait autrefois dit maintes et maintes fois qu'il ne passerait pas l'année. Et le voilà aujourd'hui, plus brillant que jamais ; une belle revanche sur la vie. Apprécier les bonheurs les plus simples était pour lui d'une aisance remarquable pour une ancienne star. La colère de la Tsebé irradia toute la classe, et afin d'y échapper un tant soit peu, il saisit une nouvelle copie, quand bien même il n'avait fini la précédente. Il leva les yeux sur elle. Pinça les lèvres. Puis abaissa le regard. Il n'était qu'un homme, et elle était une femme consciente de ses atouts visiblement, puisqu'elle lui exposait sans gêne un décolleté presque transparent. Il ne sut où poser son regard, et se racla la gorge : « Rien n'est moins sûr que votre réussite en effet, d'autant plus que vous semblez vous borner dans votre incapacité feinte, toutefois je ne pourrais laisser passer ceci sans avoir au moins essayé de toutes mes forces. » L'idée de se retrouver presque chaque soir de la semaine en sa compagnie n'était pas pour lui déplaire, bien au contraire, mais l'ardue tache était de n'en rien laisser paraître. D'un geste, il finit par se redresser, repousser légèrement la chaise pour étendre sous le bureau ses longues jambes, croisant ses bras derrière sa tête. Une position bien plus détendue, qu'il avait toujours adopté, peu importe l'âge et les circonstances. « Alors c'est entendu ? Quatre heures par semaines à disposer en fonction de vos disponibilités. Préféreriez-vous tout d'un bloc, ou bien une heure chaque soir ? »

Young Ja avait une petite amie haute en couleur, était reconnu à sa juste valeur, avait un métier stable et un appartement moderne. Lui avait largement de quoi être optimiste. Mais Sul Li... Sul Li avait un petit ami dont elle supportait tout juste la vue et avec lequel elle ne s'entendait pas. Qui sortait avec elle pour uniquement améliorer sa réputation, et l'utiliser en contrepartie comme femme à tout faire. Puis, en parlant de réputation, justement. Sul Li n'était pas reconnue à sa juste valeur, quant à elle. On ne la voyait que comme une salope. Alors qu'elle n'y était strictement pour rien. Puis, un métier stable... Elle rencontrait d'énormes difficultés à prouver sa crédibilité vu son scandale, et peinait à être embauchée. Elle accumulait les petits boulots, tantôt femme de ménage pour un gangster, tantôt accompagnatrice de ce dernier dans des soirées, puis il lui arrivait aussi de donner quelques représentations ici et là dès qu'elle le pouvait. Quant à l'appartement moderne... Elle n'avait tout simplement pas les moyens de s'en payer un, vu sa galère financière. N'avait-elle donc pas toutes les raisons du monde pour être pessimiste ? A bien y réfléchir, si, clairement. Elle se contenta de rire sur un ton amer lorsqu'il lui parla de saisir les bonheurs simples de la vie. Les saisir, peut-être, mais il faudrait d'abord qu'il y en ait, non ? Sul Li n'avait guère cette chance, malheureusement.

Essayer de toutes ses forces. Essayer, encore et encore. Mais pourquoi, pourquoi se bornait-il autant, au juste ? Elle ne comprenait vraiment pas. Enfin, elle avait cessé de le comprendre depuis un moment, de toute manière. Lui faisant toujours dos, elle se contenta de soupirer. « Si vous y tenez tant, perdez votre temps alors, je ne peux pas vous en empêcher. » Oui, elle était décidée à lui faire comprendre clairement que ces cours ne donneraient aucun résultat. Qu'il ne se fasse pas trop de faux espoirs. Puis, alors qu'il adoptait une position plus détendue, elle respira un bon coup et retourna s'asseoir à sa place, les bras croisés, et le regard toujours aussi désapprobateur. Quatre heures par semaine ? Quatre ? C'était une blague ? Elle ne put réprimer un soupire, avant de lui lancer d'une voix peu calme : « Une heure chaque soir. Je n'ai pas le temps pour quatre heures d'un bloc puisque j'ai cours de danse quasiment tous les jours, et que la danse est prioritaire. » Puis elle détourna alors le regard, tapotant son bureau des doigts. « Je ne suis pas disponible avant vingt-et-une heures... N'avez-vous donc pas peur que votre petite-amie, ou votre femme, ou la personne partageant votre vie néanmoins ne s'inquiète de votre absence le soir ? » un petit sourire accompagnant le tout. Dernière tentative. Avec un peu de chance, peut-être que cela le dissuaderait et le ferait revenir sur sa décision.

« Areum et moi ne vivons pas ensemble. » L'homme avait répondu du tac-au-tac, éprouvant d'autant plus la nécessité de prononcer le nom de sa charmante petite amie. Égoïstement, mais surtout inconsciemment, il espérait blesser la jeune femme en lui faisant comprendre qu'il était en couple, bien qu'elle le sache sûrement déjà, et que ce soit son cas. Il ignorait. Il ignorait qu'elle n'aimait pas Lu Young. Il ne savait pas non plus que ça n'était pas un couple véritable : il avait des yeux pour voir, et voyait. Ils avaient l'air épanouis. Et à cette simple pensée, une vague de chaleur traversa chacun de ses membres alors qu'il étoffait son soupire contre ses lèvres. Lèvres qu'il tortura après à l'aide de ses dents blanches qu'il dévoila rapidement. « Je suppose donc que cela règle tous les problèmes de mon côté, quant aux vôtres ils n'ont lieu d'être au vue de ce que vous m'exposez-là. » Quel mauvais prof. Quel vil homme. Se servir de la loi, qu'il ne respectait pourtant pas tout en mentant le faire, pour pénétrer l'intimité de la jeune femme tous les soirs, s'imposer dans sa vie contre son gré. Elle souhaitait de tout son soûl le convaincre qu'il perdait son temps ? Encore fallait-il qu'il comprenne qu'elle avait autant changé qu'elle ne le laissait paraître. Young Ja s'attachait encore désespérément à l'image de la jolie Maknae qu'il avait, quand bien même elle ne cessait de la détériorer chaque fois qu'elle ouvrait la bouche. Il avait de l'espoir. Et à la fois il en était dénué. Mais lui, au moins, n'était pas pessimiste. « Accordons-nous pour une heure par soir alors. Croyez-moi, je suis certain que vos résultats doubleront au minimum. » Il esquissa un sourire en coin taquin. Rien n'avait changé dans cette expression qu'il avait toujours arboré pour enquiquiner son prochain. Il se mit à rire discrètement, et redressa ses cheveux ébènes d'un geste de la main avant de recroiser les bras derrière sa nuque : « Ceci dit, passer de 2 à 4.. Cela n'a rien  d'extraordinaire. » Il ne voulait pas qu'elle s'échappe, et pour autant n'avait aucunement pour ambition de la séquestrer. Il savait qu'elle ne désirait pas rester en sa compagnie, et fit preuve d'un élan de générosité. Son regard plongea une dernière fois dans son décolleté avec toute la discrétion du monde, profondément étonné de voir ainsi ce qu'il n'avait jamais soupçonné, et se releva. Non pas qu'il ne l'avait jamais vue comme une femme, mais... Mais il n'avait jamais réussi à porter sur elle ce regard d'homme. Pas avant aujourd'hui. De quels maux souffrait-il ? « Si vous n'avez rien à ajouter, je pense avoir fini. » Young Ja tira sur sa cravate, réajusta le col de sa chemise blanche moulante, et écarta les pans de sa veste pour enfouir les mains dans les poches de son pantalon. Elle était une femme, c'était indéniable. Il était un homme attrayant, et nul ne pouvait en douter. Ca n'était certainement pas les tablettes de chocolat visibles à travers du vêtement qui allaient contredire ce fait.

Areum... C'est donc Areum qu'elle s'appelait. Elle avait déjà entendu ce nom quelque part, mais ne l'avait pas retenu. Il lui facilitait la tâche. Si c'était étrange de le savoir un couple ? Un peu. Beaucoup. Elle aurait préféré le savoir célibataire. Bien qu'elle ne se l'avouerait et ne l'avouerait jamais. Mais, à vrai dire, tant qu'il n'était pas avec Sun Nah, à ses yeux, il s'agissait là du plus important. Dire qu'elle la haïssait ne serait pas suffisant. Elle y était allergique. Dans le passé, elle avait tout fait pour être son amie. Elle lui avait offert tant de cadeaux, avait été adorable avec elle. Et comment l'avait-elle remerciée au final ? Ainsi, en détruisant sa carrière. Une sacré garce, d'après elle. Enfin bref. Tentant de feindre la neutralité une nouvelle fois, elle se contenta de hausser les épaules. Tant pis pour lui. Tant pis pour lui s'il finissait par avoir des problèmes avec cette Areum ou on ne sait qui donc parce qu'il passerait chez elle à vingt-et-une heures, en pleine soirée. Et à la phrase qui suivit, elle ne répondit rien. De toute manière, il avait fini par avoir le dernier mot. N'était-ce pas là ce qu'il souhaitait depuis le départ ? Voilà, il avait fini par l'obtenir. Elle capitulait, malgré elle. Parce qu'il était le prof, et qu'elle n'était que l'élève, après tout. Il avait le dessus, indéniablement, bien que cela l'agaçait.

Il pensait qu'elle avait changé ? Ou peut-être le contraire ? Sul Li n'en savait trop rien. Elle tentait néanmoins, par tous les moyens, de lui faire croire qu'elle n'était plus la Sul Li d'avant. Ce qui était autant vrai que faux, à y regarder de plus près. Vrai parce qu'elle avait mûri, parce qu'elle était devenue une vraie femme, aussi, s'assumant parfaitement. Et faux parce que... Malgré tout, lorsqu'elle se retrouvait avec son entourage le plus proche, elle redevenait la jolie Maknae du passé. Il suffisait de la voir en compagnie de Ren par exemple, de Hui Bin ou même du fameux Tae Yang. C'était toujours le même manège. Des caprices de princesse. Des sourires et des rires à n'en plus finir. Et des aegyos à souhait. Mais aussi... Son fameux air boudeur. Qu'elle arbora aussitôt qu'il parla de ses résultats. Etait-il en train de... Se moquer ? « YAH ! T'es... Vous êtes un prof oui ou non ? De quel droit vous permettez-vous de porter un tel jugement sur les résultats de vos élèves ? Humpf... » Le fusillant du regard une dernière fois, elle se leva aussitôt qu'il lui annonça qu'ils en avaient donc fini. Mais alors qu'elle s'apprêtait à partir... Il... Se mit à... Enfin, il le faisait sûrement exprès, non ? Sans qu'elle ne s'en rende même compte, son regard s'égara sur son torse... Et elle constata alors qu'il avait passé visiblement beaucoup de temps à la salle de sport ces dernières années. Elle se reprit tout juste à temps, alors qu'elle appuyait sur la poignée de la porte. « … Au revoir. » qu'elle lança en tentant d'être aussi détachée qu'elle le pouvait, alors qu'elle claquait la porte derrière elle.