Une autre journée s'achève, une autre journée passée à faire un travail que je n'aime pas. L'avantage de ce boulot est que je peux passer du temps avec des personnes agréables, comme mon colocataire qui s'avère aussi être un surveillant, puis il y a aussi d'autres personnes que je viens à connaître, des professeurs, et malheureusement des élèves comme cette jeune fille qui me "harcèle", mais ce mot est trop fort, elle ne me suit pas jusque chez moi et parfois elle peut être mignonne.
Je jette un œil à ma montre, puis je laisse les autres surveillants faire le reste du boulot, hier je suis resté jusqu'à la fermeture de l'université, je n'ai pas envie de passer ma soirée encore ici. Du moins pour travailler. Peut-être que Young Im est toujours là. Ma vie ressemble à un champ de mine en ce moment, j'ai bien envie un peu de repos, et je sais qu'avec elle je pourrais passer un bon moment. Qui plus est, elle est professeur de danse, comment aurais-je pu tomber sur une meilleure personne qu'elle ? Je me rends vers le gymnase, normalement, elle devrait avoir fini son dernier cours, du moins je l'espère. Je vérifie chacune des salles de danses jusqu'à la voir dans l'une d'elle. Je souris de toutes mes dents, passe ma tête par la porte, je cogne légèrement contre celle-ci. « Est-ce que mademoiselle Cho est occupée ? » J'entre à l'intérieur de la salle et la rejoint, je passe mes mains sur ses joues en la voyant, lui faisant faire une tête à la fois mignonne et ridicule. Elle doit être la seule femme avec qui je me permets d'être aussi tactile sans avoir d'arrières pensées. Avant, j'étais un coureur de jupons, je ne m'attardais que rarement avec la femme avec qui je m'amusais. Bon ce temps est révolu, à croire que je deviens un adulte, enfin. C'est plutôt effrayant quand on a que vingt-et-un ans.

C’était bientôt la fin de la journée. Encore une journée à faire ce que j’aime. Cela faisait bientôt trois ans jours pour jours que j’avais commencé ma nouvelle vie, laissé ma vie de débauche de côté, en grande partie grâce à mon meilleur ami. C’était lui qui m’avait poussé à accepter cet emploi. Et aujourd’hui, ma vie était bien plus stable. Cette nouvelle vie m’offrit de nouvelles et de belles rencontres, dont une en particulier : Duan Jie. Il était surveillant et c’était un de mes premiers collègues avec qui je m’entendis immédiatement. Partageant la même passion, ça aidait.
J’étais en train d’achever mon dernier cours de danse. C’était du hiphop. J’étais essoufflé un peu transpirante. Apres tout, je dansais depuis ce matin, que ce soit pour mes cours ou pour moi-même. Applaudissant les efforts des étudiants, je leur dis à demain. Me dirigeant vers mon sac, j’en sorti une grande bouteille d’eau déjà bien entamé. Alors que j’en avalais deux longues gorgées, j’entendis toquer à la porte, une tête dépassante. Voyant de qui il s’agissait, un sourire s’esquissa sur mes lèvres. « Je suis toujours occupée pour vous, monsieur Duan. » Je l’avais dit sur le ton de la taquinerie. Après tout lui et moi, nous avions une relation de chat et chien assez proche. Je le laissais me prendre mes deux jours. « Arrêtes-ça, je dois avoir une tête de mongole. » En réponse à son geste, je lui passais une main dans les cheveux pour les ébouriffer, riant doucement. Jie était un des seuls mecs avec lesquels je ne jouais pas. On était amis, j’avais confiance en lui. Ce qui me permettait d’être proche de lui sans arrière-pensée. Pourtant, je ne lui avais rien dit de mon passée, ne voulant pas le faire fuir. Et puis, je voulais effacer cette petite fille de mes souvenirs. « Que me vaut l’honneur de votre visite mon cher ? »

Tu viens visiblement de terminer un cours, vu la façon dont tu bois à grosses gorgées dans ta bouteille et à la sueur qui recouvre ton corps. Je plisse les yeux en secouant la tête de droite à gauche lentement. Toujours en train de me lancer des piques, je n'aurais jamais dû commencer ce jeu avec toi, mais il s'avère tellement amusant de jouer avec toi et de te faire tourner en bourrique, je ne peux plus m'arrêter. « Haha, très drôle YoungIm. » Je lâche tes joues dès que tu fais cette réflexion, je croise les bras contre mon torse, ne me préoccupant pas vraiment de mes cheveux que tu viens d'ébouriffer, je ris vivement. « La tête de mongole tu l'as sans que je fasse ça, tu sais... » Je fais exprès de m'exprimer alors dans ma langue natale, espérant que tu ne comprennes pas un mot de ce que je dis, un sourire sournois étirant les commissures de mes lèvres.
Je me tourne vers le miroir et j'arrange mes cheveux en bataille puis je me retourne vers toi, reprenant mon sérieux. Je suis peut-être joueur avec toi, mais au fond je suis quelqu'un de plutôt posé. « Je viens de finir ma journée, je me suis dit qu'on pourrait passer du temps ensemble. Tu es libre là maintenant ? » Je passe ma main sur l'arrière de ton crâne en t'adressant un petit sourire. Les choses ne vont pas fort en ce moment de mon côté et je suis souvent déprimé, j'espère que tu sauras m'accorder un peu de ton temps. Pour détendre l'atmosphère, et surtout pour éviter que tu remarques mon état de déprime, je te lance : « Par contre, je te prie de prendre une bonne douche avant qu'on ne fasse quoi que ce soit. » Je pouffe de rire en posant le dos de ma main contre mes lèvres, et je recule un peu, ne voulant pas que tu me tapes ou autre, néanmoins, je sens que tu vas juste me bouder, comme d'habitude quoi, avec le temps, je finis par te connaître.

Tu me lances des piques, je t’en lance à mon tour. Un petit jeu que tu avais toi-même instauré dès notre rencontre. Malgré le fait que je savais pertinemment que tu me taquinais, qu’il n’y avait rien de méchant, je ne peux m’empêcher de bouder ou de t’ignorer à défaut de ne pas m’énerver. Pourtant, je ne pouvais pas m’arrêter. Te faire tourner en bourrique, quel bonheur. Je gonflais les joues en une moue boudeuse quand tu me fis un charabia en ta langue natal. « Je n’aime pas quand tu parles en chinois, je ne comprends rien… » Je te regardais te recoiffer dans le miroir, avant détruire à nouveau ce que tu avais remis en place. Je te poussais ensuite gentiment pour te montrer mon désaccord. « Je ne sais pas … il faut que je vérifie mon agenda. » encore un peu rancunière de ton dialogue en mandarin, mais bien vite, je te fis un grand sourire. « Evidemment que je suis libre. Tu veux aller manger quelque chose ? Boire un verre ? Sortir danser ? Cinéma ?... » J’étais déjà enthousiaste à l’idée de sortir. Il était rare que tu me demandes une chose aussi simple sur un ton sérieux. Pendant un instant, je m’étais dit que quelque chose clochait, mais ta réaction suivant, chassait mes doutes. Je repris ma mine boudeuse avant de croiser mes bras sur mon ventre. « Cesse de rire telle une hyène, tu veux ? » Sans le regarder, je me détournais pour aller prendre mes affaires dans mon sac : un essuie, du savon et des affaires de rechanges. Puis, je me dirigeais vers les douches des vestiaires. Je pris bien tout mon temps pour prendre ma douche, le plus longtemps possible en fait, juste pour te faire poireauter. Une sorte de petite revanche personnelle pour tes paroles. Je te rejoignis les cheveux toujours mouillés que je laissais sécher naturellement à défaut de ne pas avoir de sèche-cheveux sous la main. Je rangeais mes affaires dans mon sac avant de le mettre sur mon dos. « Alors Jie, où comptes-tu m’emmener ? » dis-je le sourire retrouvé.

Je n'arrive même pas à décrire le sentiment de satisfaction que je ressens lorsque je t'embête. En même temps, tu es si mignonne quand tu boudes, je ne peux que continuer de t'enquiquiner, et puis au fond, je sais que tu sais que je plaisante. Wow, ça fait trop de "sais" dans une même pensée je crois... J'enfonce une main dans ma poche avec un sourire malicieux. « Justement, tu ne comprends rien. » Je lève les yeux au ciel lorsque tu parles d'agenda, quelle peste tu peux faire des fois, si je ne t'aimais pas bien, je t'aurais envoyé bouler il y a longtemps, j'en suis persuadé. Je pense que le mieux à faire et d'aller boire un verre, danser me tenterait bien, mais j'en envie de parler, je ne sais pas pourquoi, mais je suis sûr que tu es la bonne personne pour ça. Je ne crains pas tes réactions, sans doute parce qu'on se connaît depuis peu et puis au final, en ce court laps de temps, tu as su gagner ma confiance. En y repensant, tu dois bien être la seule femme à qui je fais des confidences. Sans être passé par la case lit ou autre auparavant. « Allons boire un verre, et va te préparer veux-tu. » J'ignore ta dernière réplique avant de sortir de la salle pour aller aux vestiaires, en faisant bien exprès de rigoler. Puis j'arrange une seconde fois mes cheveux en pagaille. Pendant que tu t'absentes, je m'entraîne à faire quelques figures acrobatiques. Je n'ai pas souvent accès à une salle aussi belle, j'en profite donc dès que j'en ai l'occasion. Ainsi, je ne remarque même pas que tu fais exprès de prendre ton temps afin de me faire rager. Lorsque que tu reviens, je passe mon bras autour de tes épaules en levant les yeux aux ciel. « Je te l'ai dit, on va boire un verre ! » Je sors du gymnase sans te lâcher et tourne la tête vers toi. « Tu as une voiture toi ? Perso, je n'en ai pas... Sinon on peut prendre le bus, je te laisse le choix. »

Avant d’entrer dans la salle, je m’aperçus que tu t’étais mis à danser. Des figures de plus en plus difficiles défilaient devant mes yeux. Je ne voulais pas te déranger. J’adorais te regarder quand tu faisais ce genre de choses, j’avais même envie de venir te rejoindre pour danser, mais je venais de me doucher. Et tu m’aurais encore sorti une saleté comme quoi je puais ou je ne sais quoi encore. Je ne sais pas vraiment ce qui nous avait fait nous rapprocher si rapidement, ni comment je t’ai offert si facilement ma confiance, mais la danse devait y être pour beaucoup. Apres un moment, je fis mon entrée tout en applaudissant. « Tu t’améliores comme je vois. » Je le taquinais bien entendu, il avait toujours été d’un excellent niveau. Je te laisse passer un bras autour de mes épaules, je me laissais faire. Pourtant quand tu me répétas qu’on allait boire un verre je te donnais un coup de coude dans les côtes. « Je te demandais le nom du bar ! » Une fois dehors, je leve un sourcil interrogateur : « Tu m’as déjà vu venir en voiture ? »Puis, je hausse les épaules. « Je n’ai qu’un vélo, la voiture coute trop chère pour moi. » Je pointais mon véhicule du doigt dans le parking, installé sous un petit abri contre la pluie. « A moins que tu ne veuilles t’assoir à l’arrière et me laisser pédaler, on a plus qu’à prendre le bus, mon cher. » Déjà, je me dirigeais vers l’arrêt de bus, passant mon bras autour de ta taille.

Je suis un peu surpris lorsque tu reviens, et surtout lorsque tu commentes mes figures, je ne savais pas que tu étais revenue assez vite pour me voir à l'œuvre. Je lance un rire exagéré. Ces figures je savais les effectuer depuis longtemps déjà, alors si c'est ce que tu appelles s'améliorer, tu fais fausse route. « J'ai toujours été aussi bon. » Tu me taquines sans doute à ce sujet, mais autant en profiter pour me vanter un peu, ce n'est pas dans mes habitudes de le faire. Je me pince un peu les lèvres, c'est tellement tentant de te dire que je veux y aller à vélo et te faire pédaler toute seule. En plus, je n'ai jamais eu cette expérience, c'est quelque chose de plutôt inédit, je devrais sauter sur l'occasion sans hésiter. Tout en me dirigeant vers la sortie de gymnase, je déclare : « Hm... On pourrait juste aller au bar le plus proche d'ici, comme ça, tu n'auras pas trop de mal à pédaler. » C'est assez drôle quand même, si un professeur ne peut pas se payer une voiture, moi, simple surveillant, que puis-je m'offrir ? Je n'ai même pas de quoi m'offrir un vélo, j'ai assez pour "survivre". J'espère pouvoir vite me réorienter vers ce que je veux réellement faire, je ne sais pas ce que j'attends encore pour le faire. Peut-être que je devrais en parler à Shûji, je ne sais pas trop... Je verrai bien dans le futur.

Spoiler: