Jae Duk... Jae Duk outragé ! Jae Duk brisé ! Jae Duk Martyrisé ! Mais... Jae Duk libéré.

Des travaux de rénovation. Mon bureau était devenu un tableau, une oeuvre attisant un peu plus ma haine et colère. J'étais toujours furieux, même après que des jours soient passés. Le temps efface des choses ? Que neni. Il ne fait que réveiller le diable au fond de moi.

Les tsebes se sont activés pour clean à peu prêt tout le bâtiment, mais j'ai tenu à garder l'horreur dans mon bureau. J'ai envie de vomir à chaque fois que je pose les yeux sur ces murs, à chaque fois que je vois l'écran de la télévision brisé et la batte de baseball coincé dedans. Ce film, ces photo-montages, cette peinture et toutes ces saloperies qui remplaçaient mes affaires... Une bonne farce. Une farce qui allait être difficile à digérer pour les auteurs de ce crime. Les malfrats avaient réussi à me tirer ma réserve personnelle d'herbe, autant vous dire que j'étais encore un peu plus remonté.

Aujourd'hui j'ai réussi à prendre une décision. Je pense avoir été assez clément avec ces scélérats. Ces hérétiques qui renient l'autorité du roi. De sombre idiots. Arrivant après les cours au bâtiment des verts, je joue avec le sac en plastique entre mes mains tout en traversant les couloirs pour me rendre dans la cuisine. L'odeur de javel me dégoute, le shit manque à mon odorat. Ce bâtiment pue le propre, pue l'hygiène, il me donne envie de vomir en ce moment, mais je continue de m'efforcer de venir ici pour prouver que je n'ai pas peur de ces conneries. Je le fais pour l'image, non pas par envie. Ce n'est qu'une question de temps. Tout fini par se payer. Cet endroit fait fuir encore quelques TSEBE, probablement à cause de ce sentiment d'insécurité. Comprenez, si des merdeux ont réussi à s'introduire ici, alors "les flics n'auront pas de mal à faire une descente ici".

Je pose nerveusement mon derrière sur un comptoir de la cuisine, tirant une casserole pour m'en servir comme miroir. La salle de bain... Je préfère encore l'éviter : si je n'ai pas peur d'aller dans mon bureau, la glue au sol de la salle d'eau m'a bel et bien traumatisée. Mes mains attrapent rapidement le contenu du sac. C'est bel et bien la première fois que je fais une chose pareille mais soit. Croisant les jambes, je soupire longuement pour ouvrir le paquet censé contenir de quoi me teindre en blond - ou décolorer ? Je ne comprend rien à ces conneries. Patience mh. Que dal. J'arrive pas à me concentrer sur la notice alors je tire une cigarette de mon paquet. Une teinture de guerre pour punir ces connards. Ils le paieront, c'est certain.

Chose peu commune, j'avais bossé pour les cours aujourd'hui. Pour ça, je m'étais enfermée dans mon appartement, comme seule fenêtre sur le monde extérieur, ma fenêtre. Qui donnait sur un escalier de secours. Génial. Mais ce genre de détail était insignifiant, j'avais appris à me concentrer dans n'importe quelles conditions, j'aurais très bien pu étudier lors d'une fête chez les tsebe que je n'aurais pas réellement été dérangée. Seulement voilà, j'étais rarement motivée pour étudier mes cours, et c'était la manière la plus sûre que j'avais d'étudier, si je voulais avoir une raison valable de rester à Suwon. Je savais que si j'arrêtais mes études, mon oncle arrêterait de m'envoyer de l'argent - déjà qu'il ne m'en envoyait pas beaucoup. C'était assez paradoxal, quand on sait que nous partagions le même but. Mais il jugeait que c'était une bonne façon pour moi de passer inaperçue. Je supposais qu'il avait raison.

Une fois mon bourrage de crâne terminé, je décidai de me rendre à la fraternité tsebe, sans but particulier, juste chercher quelqu'un qui aurait un truc de prévu au soir, genre une fête de malade. Après tout, pour une fois que je ne travaillais pas au club, j'avais bien droit de me faire plaisir. Cependant depuis quelques temps la fraté était plus vide qu'à son habitude. Sans doute à cause du petit cadeau que nous avaient laissé les jéos. Je ne comprenais pas qu'on puisse être effrayé par si peu ... Bon, d'accord, l'odeur de javel n'avait rien d'agréable mais personnellement ... j'avais trouvé ça assez amusant. Fallait reconnaître qu'ils avaient bien joué leur coup. Après, je n'étais sans doute pas là depuis suffisamment longtemps que pour le prendre mal, sans compter le fait que je ne m'attache jamais aux choses : elles sont trop faciles à détruire. La preuve avec la fraternité. Quand on voyait le massacre, ça ne donnait pas envie d'être dans la peau du président.

Je me dirigeai instinctivement vers la cuisine, ignorant l'odeur de propre. C'était pas vraiment une odeur agréable pour qui est habitué autre chose, ça pique un peu le nez, ça rappelle l'hôpital, mais ça ne me dérangeait pas. En fait, à choisir, je préférais ça que l'odeur de pisse, de baise et de transpiration dans laquelle je trainais à peu près tout les soirs, ça me changeait. Je me dirigeai instinctivement vers la cuisine, sans doute parce que j'y étais habituée à y voler des space cakes, mais ne tombait que sur ... du propre. Ah, oui. Ça par contre c'était un détail qui m'ennuyait un tantinet plus : on y trouvait plus rien dans cette fraternité. Enfin, si, j'y trouvai le président, avec du décolorant Yo j'ouvris tout de même les armoires en désespoir de cause. Niet. Nothing. Nada. Et j'avais pas grand chose sur moi, génial. Je jetai un regard curieux au préso, que faisait-il avec du décolorant ? Besoin d'aide ? c'était peut-être cliché de dire ça mais ... il ne semblait pas y comprendre grand chose.

J'ai l'impression d'être aux urgence, dans un bloc à observer une opération conduite par mon paternel. Seul détail qui change : l'odeur de cigarette mêlée à celle du propre. Autant dire que ce n'est pas vraiment agréable. Il va falloir du temps pour se sentir comme chez soi ici. La prochaine étape, c'est peindre les murs où les tags n'ont pas réussi à disparaître. Après l'odeur d'hôpital, celle de chantier. J'hausse les sourcils. Génial.

Je n'ose même pas regarder cette notice. Je suis capable d'écraser ma cigarette dessus si la patience vient à manquer. De toute façon on ne peut pas vraiment dire que j'ai le temps de me pencher dessus car quelqu'un entre dans la cuisine. Relevant les jambes pour m'assoir en tailleur et poser ma main libre sur un de mes genoux, j'observe l'intrus... Ou du moins, l'intruse. Mes yeux fixent ses cheveux d'un air absent, comme si je venais de voir le messie. Non elle n'est pas blonde de naissance, racontez ces cracks à qui vous voulez mais pas à moi. La blondinette me salue pour aller fouiller les placards de la cuisine. Malgré toute la volonté que j'ai, je n'arrive pas à retenir un rire qui ne respire en aucun cas la joie. Il est mauvais, amère, tout comme je le suis actuellement. Qu'est-ce que tu cherches exactement? Je porte la cigarette une nouvelle fois à ma bouche pour tirer longuement dessus. On avait tout jeter. Tout, même s'il n'y avait rien de grave à l'intérieur, dans le doute, tout avait fini à la boite à ordure. Des insectes dans les space-cakes, c'est ce qu'on m'avait reporté. Si ces connards de jeo savaient combien de temps et d'argent ça coûtait de faire ça, ils auraient préféré les emporter plutôt que de les pourrir... M'enfin s'il y a bien une chose que l'argent ne fait pas, c'est bel et bien rendre intelligent. Les jaunes ne peuvent pas payer un chirurgien pour se faire greffer un cerveau. "Dommage" pour cette bande de bras cassés.

Hansa était nouvelle au sein des Tsebe et avec les événements je n'avais pas réellement pris le temps de m'intéresser à elle, préférant me focaliser sur cette guerre de fraternités. Ce n'est que lorsqu'elle se retourne pour me proposer on aide que réalise : depuis tout ce temps je la fixais elle et sa chevelure blonde. Du bout des doigts, je coince la cigarette entre mes lèvres et j'attrape la notice reposant près de moi pour la lui tendre avec le flacon supposé contenir la teinture - je crois. tu y comprends quelque chose toi? Je retiens un juron, parce que les Tsebe n'ont pas besoin de subir la colère du président. Ca fait des jours que je me contrôle, que j'essais de rester tranquille. Peut-être que ça les incitera à revenir ? Après tout, peut-être ont-ils simplement peur de moi ?

Le rire de Jae Duk me passe clairement au dessus de la tête, je l'aurais presque ignoré s'il ne m'avait pas demandé ce que je cherchais. Visiblement, il devait s'en douter sinon il n'aurait pas rit. Je soupire brièvement, mes mains toujours posées sur l'armoire que je venais de reposer sur l'armoire, haussant les épaules Je regarde un peu ce que je pourrais ramener pour que cette fraté ressemble à nouveau à ce qu'elle était. Je tourne la tête vers le président, je lui souris faiblement Je suis pas sûre d'être assez riche toutefois carrément pas que je l'étais. Et je pouvais pas me permettre de me servir sur les stocks que j'étais censée vendre, j'avais des comptes à rendre à mes propres fournisseurs. Et je n'étais pas assez généreuse non plus, de toute façon. Partager avec ceux que je connaissais, pas de problème, mais j'étais nouvelle dans la fraternité, et si j'y connais trois personnes c'était beaucoup. Et encore, dans les quelques personnes que je connaissais, il y en avait un qui pouvait pas me voir en peinture ... Même sans rien faire de mal, j'arrivais à m'attirer des ennemis, à croire que j'avais une tête qui revenait pas aux gens.

J'avais vu juste, le roi tsebe comprenait rien à la décoloration qu'il tenait. J'attrapai la notice, et y jetai un coup d’œil rapide. En y repensant, ça devait faire des années que j'avais les cheveux blonds, bien cinq ou six ans, je commençais à avoir l'habitude - d'autant plus que j'essayais de la refaire assez régulièrement pour éviter les racines. Le coup d'oeil, c'était pour vérifier que c'était la même chose que le produit que j'employais. Et effectivement ça l'était Tu veux que je te le fasse ? Ce sera plus rapide. Effectivement, à aucun moment le coréen n'avait prétendu vouloir se décolorer les cheveux, mais je doutais qu'il soit du genre à jouer les coiffeurs pour autrui. Je me tapai à côté de lui, dos au comptoir sur lequel il était assis. Je pris le temps de lire la notice un peu plus attentivement, sans doute mon côté perfectionniste. Qui plus est, Jae Duk avait pas une super réputation, il n'était pas connu pour être clément, du coup si je pouvais éviter de faire une erreur et de lui cramer les cheveux, ça m'arrangerait. J'avais assez de Tasyr pour me chercher des merdes au sein de la fraternité, par besoin du président pour envenimer les choses.

La vérité était que j'étais riche. Ou du moins, mon oncle l'était. Quand je vivais chez lui à Séoul, c'était la belle vie. J'avais autant d'argent que je le voulais, et je vivais dans une magnifique maison. Puis j'avais dû déménager à Suwon, et mon oncle avait coupé les vivres. C'était pour la bonne cause pourtant que j'avais quitté la capitale, mais mon oncle avait jugé judicieux de me faire vivre dans un appartement miteux, que je devais partager en prime - enfin, Chun Hei était plutôt cool comme fille. Mais le changement de vie avait été assez radical, je devais bien le reconnaître. En guise de réponse je haussai simplement les épaules Je n'en doute pas. Ce genre de phrase, je ne pouvais qu'y adhérer, j'étais la première à le penser.

Je termine la notice, rien de bien extraordinaire donc. Il n'allait pas manger ? Je le regarde et lui sourit Tu risquerais de ne pas apprécier le goût de toute façon, quoique, mon corps devait être composé à au moins septante pourcents de drogue, je devais donc avoir le goût d'un space cake géant non ? Le sang et les os en plus. Toujours est-il que je sors les produits dans la boite, répondant à Duk par un simple Vas t'asseoir, et je m'occupe du reste. Je pris les produits, mélangeant ce qui devait l'être, selon des gestes mécaniques, presque automatiques, avant de mettre les gants et de revenir vers Jae Duk et de lui appliquer le produit Si je peux me permettre, pourquoi cette subite envie de changement ? passer du noir ou blond, pour un homme surtout, ce n'était pas rien. Il était vraiment que les changements de couleur étaient courants chez les coréens, néanmoins ça piquait ma curiosité pour le coup.

Je remarquai bien rapidement que le Duk méritait sa réputation : il ne semblait pas des plus évidents à vivre. Pourtant, je n'avais pas envie de prendre des pincettes cette fois. Après tout, je lui rendais service là non ? Alors ses regards meurtriers, il pouvait se les mettre où je pense. De toute façon, aussi grand et fort ce gaillard pouvait être, il ne m'effrayait pas. J'avais grandi au milieu d'hommes forts, mon oncle qui me frappait pour m'endurcir, son fils pour me briser, je n'avais jamais plié. Jamais pleuré. Alors ce n'était certainement pas le tsebe qui allait m'effrayer ... Néanmoins, je ne relevai pas. Je n'avais pas envie de me battre, j'avais autre chose à faire.

Il se braque à nouveau, bon sang. Je pouvais comprendre que cette guerre des fraternités le mette sur les nerfs, mais je ne lui avais strictement rien fait. Heureusement, il s'adoucit presque aussitôt, et je pousse un léger soupir. J'avais l'impression d'avoir à faire à un fauve dans sa cage, qui rugit puis recule, qui tourne en rond à en devenir fou. Il était dès lors hors de question que je recule moi aussi, j'allais rester fixe et apprendre à m'y faire. Au pire, je mourrais, était-ce grave ? Pourtant je m'y intéresse. Et ça n'a rien de moqueur, d'agressif, ou quoique ce soit, c'est juste une curiosité de ma part. T'es pas obligé de me répondre ceci dit. Je haussai les épaules comme pour appuyer ce que je disais. Mon ton était neutre, plus chaud que froid pour éviter qu'il ne se braque davantage, c'était pas non plus mon but. Je voulais juste lui faire comprendre que je n'étais pas son ennemie, et que je ne comptais pas l'être. Si tu trouves un tabouret, je t'avoue que ce serait genre mille fois plus pratique. Pas que j'étais petite hein, mais que vu la hauteur à laquelle il était, j'allais vite avoir une crampe au bras.

Canari. Un tsebe avec les cheveux jaunes. Le comble du comble. Une bonne blague probablement qui ferait rire plus d'un vert et moi avec, mais cela laisserait les jaunes croire que je leurs porte encore plus d'importance. Plus de vingt minutes donc ? J'ai tout mon temps aujourd'hui. Ça ira, je n'ai pas de plan prévu, pas de complots à préparer ni de réunion skred dans l'agenda. On pourrait croire que je vis un scénario à la Dallas, avec des complots des tromperies et supercheries... C'est probablement le cas. Notre vie se résume à un bon téléfilm américain ici, à Suwon. si on y ajoute la mafia, je suis sûr qu'on peut sortir ça au cinéma tellement ces histoires sont ridicules... Quelle idée d'attaquer un roi comme ils l'ont fait.

Mes yeux se perdent de nouveau sur la jeune femme. Bien qu'elle soit typée coréenne, ses yeux en disent long sur ses origines. Je me sens presque mal à l'aise en remarquant qu'elle n'a pas détourné les yeux depuis qu'on discute. Mal à l'aise, moi ? Presque. Il en faut plus, bien plus, mais soit, je suis un peu déstabilisé par tant d'assurance. Ces yeux ont vu des choses, ils ne me regardent pas comme le font les autres Tsebe. Je ne suis pas un simple présidungue, pas un simple type qui dirige la frat', pas un fou psychopathe... J’ai l'impression d'être quelqu’un d'humain. Ah. L'humanité, cette douce utopie qui n'est pas mienne. Il répondront à l'attaque, c'est sûr. Ils ont besoin de prouver qu'ils ont de l'importance et pour ça ils n'hésiteront pas à soudoyer des faibles. Je saute sur mes pieds, m'avance de quelques pas. On dirait presque un sergent de l'armée américaine dans les films quand il parle à ses soldats pour les confronter à la guerre. Il ne faut pas se faire d'illusion là non plus, la situation, bien que moins meurtrière, est similaire. Nos visages si proches et à la fois si éloigné, je paraît presque crédible si on oublie le produit sur ma tignasse. Un instant, je la fixe droit dans les yeux, tentant de la voir dévier ces pupilles qui me narguent depuis tout à l'heure puis je reprend tandis que les doigts de ma main escaladent son bras. Cette histoire ne va pas s'arrêter là. Ça va aller crescendo. Y'a de fortes tête là bas, des gens qui voudront prouver qu'ils ont une quelconque valeur... Cette fois, j'attrape une de ses mèche de cheveux blond que j'enroule autour de mes doigts. Mais ils sont faible et insignifiant... Mais s'ils cherchent de l'importance, je leur sen donnerait sur le devant de la scène. Il parait que j'ai de l'amour à revendre.