Des fois il y a des journées je me demande pourquoi elles existent tellement j'aurai pu m'en passer. Le réveil n'a pas sonné ou peut être que je l'ai pas entendu alors que la douleur elle, elle s'est réveillée. J'ouvre les yeux déconnecté de la réalité. Je ne sais pas qu'elle heure il est. Je tombe du lit, sens figuré quoi qu'avec mon hématome sur l'avant bras on pourrait le prendre au sens propre. J'y fais pas attention, c'est pas une zone dangereuse, j'ai appris à ne plus m'en inquiéter. J'y suis carrément habitué. Je me lève complètement décalé, comme si on venait de changer d'heure, direction la salle de bain. Histoire de ressembler à autre chose qu'un mec qui a passé sa nuit dehors. D'accord, j'ai passé une partie de ma nuit dehors mais c'est pas comme si j'avais pas géré. Et puis un peu d'eau chaude ferait pas de mal à ma douleur, quoi que si ça devrait la faire disparaître. J'oublie la fac, la frat', la radio, tout, je peux pas sortir dans cet état. Comme prévu la douche à plus ou moins l'effet désiré. Pourtant je suis toujours pas prêt à bouger même si j'ai l'air en forme. Ce jour devrait vraiment pas exister. Je regarde mon portable, plusieurs messages, j'y répondrais plus tard. J'ai l'impression de me couper du monde. C'est toujours comme ça dès que ma maladie me fait comprendre qu'elle et toujours là. Et pourtant ça je m'y habitue pas. J'allume la télé, je tombe sur un reportage sur les sports de contact. Super, merci la télé de me faire rappeler que tout ça ne sera jamais fait pour moi. En train de rager sur la télé, la sonnette qui ne s'arrête pas me sort de mes pensées. J’éteins direct' la télé et me dirige vers la porte et ouvre. J'espère que personne n'est venu me faire une crise parce que j'ai pas donné de signe de vie par un simple sms. Mika. Elle n'aurait pas pu mieux tomber. Je crois que j'aurai voulu voir personne d'autre. Je souris « Salut toi, je suis content de te voir. » et l'invite à entrer. Un fois à l'intérieur je l'observe silencieux, j'ai l'impression qu'elle n'est pas au meilleur de sa forme. Je me fais peut être des films, je devrais simplement lui demander si ça va, mais c'est plus fort que moi. « Il y a un problème ? » je demande en m'approchant d'elle, inquiet.

Voir Mika me fait oublier mon état, c'est immédiat, je n'y pense plus. Beaucoup plus inquiet pour elle que pour moi je réponds à son câlin en passant mes bras autour d'elle. L'inquiétude grandit, sans me séparer d'elle je lui demande s'il y a un problème. Je sais que je ne perds pas de temps, qu'elle vient d'arriver, que ce n'est peu être pas le meilleur des accueils mais elle me connaît. C'est comme si je répétais encore et encore que j'étais là pour l'écouter. Et je l'écoute attentivement quand elle me raconte ce qu'il s'est passé. Ceux qui me connaissent bien savent à quel point je déteste l'abus d'autorité et les injustices comme celle-là et forcément ce que j'entends me révolte. Mais pas vraiment du genre à faire des scandales, j'ai envie de lui faire oublié ce moment. Qu'il devienne un lointain souvenir. « C'est fini, maintenant tout ira bien. » Je passe une main dans ses cheveux, toujours le même discours optimiste pour ne pas se perdre dans le passé. Elle recule et s'excuse d'être venue sans prévenir. J'attrape sa main « Mika tu sais très bien que tu n'a pas besoin de prévenir. » je lâche sa main et ajoute d'un ton chaleureux « Ma porte est toujours ouverte pour toi. » C'est la moindre des choses que je peux faire pour elle. Pour elle qui sait tout pour ma maladie et qui est toujours là aussi. Je la regarde se diriger vers le canapé, moins inquiet maintenant que je sais. « Je t'emmène ça. » Chose dite, chose faite sans perte de temps, je lui tend le vêtement. Elle aussi a remarqué que je ne vais pas vraiment bien. Parfois j'ai encore du mal à réaliser qu'elle sait tout après tant d'années sans en parler à personne. Je m’assois à côté d'elle et je réponds, hésitant. « C'est rien. Toujours la même douleur chronique. Je vais juste attendre que ça passe. » baissant la voix sur la fin. Je me lève « Tu dois avoir faim, ou soif ? Dis moi de quoi t'as besoin. Tout ce que tu veux et je te l'apporte. » Non ce n'est pas une façon maladroite de changer de sujet, enfin peu être un peu au fond. Mais c'est surtout que je ne veux pas qu'on parle de moi après ce qu'il lui est arrivé. Ma douleur habituelle c'est rien à côté d'une garde à vue alors qu'on est la victime. « Et tu le sais déjà mais fais comme chez toi. » Un petit sourire se dessine sur mes lèvres, faudrait peut être que j'arrête de me répéter autant.

Il n'a suffit que de quelques secondes pour que toutes mes mauvaises pensées s'envolent. Rien qu'en étant présente Mika me fait me sentir moins seul. Depuis qu'elle est au courant, je sais que je ne suis plus seul face à la maladie, mais j'ai encore du mal à l'accepter. Son étreinte me fait du bien et sans prétention aucune j'aime penser que l'inverse est vrai. Je lui répète une nouvelle fois qu'elle est toujours la bienvenue. Elle le sait, sinon elle ne serait pas là. Peut être qu'au fond j'ai peur qu'un jour elle hésite à venir alors je ne peux pas m'en empêcher. Peur irrationnelle. Elle s'avance un peu plus dans l'appartement et s'installe me demandant un petit service. Service rendu. Je m'assoie à côté tandis qu'elle se change. Un rapide sourire se dessine sur mes lèvres en pensant à notre amitié. J'imagine qu'elle ne laisse pas n'importe qui la voir comme ça. Je me sens reconnaissant pour sa confiance. Elle s'inquiète pour mon état. Moi aussi je lui fais confiance et pourtant ma voix se fait hésitante. Oui je sais, j’acquiesce simplement d'un signe de la tête accompagné d'un sourire pour la remercier. Puis je change de sujet, jugeant que mon état n'est pas suffisamment grave pour qu'on s'occupe de moi. « J'ai et je vais te chercher ça. » elle ne demande pas grand chose. Peut être qu'un autre lui aurait fait un discours moralisateur lui disant de manger plus. Peut être que c'est ce que je devrais faire mais ce n'est pas dans ma nature. Je n'insiste pas me dirigeant simplement vers la cuisine. Tout est toujours rangé, je n'ai pas de mal à trouver, je sais où chercher. J'attrape un grand verre et j'y sers de l'eau fraîche. Je passe un coup d'eau sur la pomme. Je lui apporte et lui tend le tout. Je m'assoie à nouveau, elle me pose une question mais ne me laisse pas le temps d'y répondre ce qui me me décroche un sourire. Je baisse la tête, elle me connaît, elle sait forcément ce que j'allais répondre. Je n'ai pas envie qu'elle se fatigue encore plus qu'elle ne l'ait mais je dois avouer que je n'ai pas eu un vrai repas depuis mon réveil brutal. Je la regarde avec un regard sincère. « Je veux bien oui. » Ce n'est pas un oui pour ne pas la contredire, je ne suis vraiment pas contre cette proposition. « Tu saurais cuisiner un plat japonais ? » Je dois avouer que ça me changerait un peu de la nourriture coréenne. Si ce n'est pas possible, je ne ferai pas mon difficile. « C'est comment de vivre avec un lycéen ? » En dehors du fait qu'il faille cuisiner, évidemment. « Il est facile à vivre ? » Je me rends compte que depuis son arrivée on a plus parlé de la raison de sa présence ici. Avant qu'elle cuisine, que le sujet soit clos, je me tourne vers elle et pose délicatement ma main sur son épaule. « Peut être que tu as plutôt envie de parler d'autre chose ? » Mon inquiétude revient. C'est vrai que je veux lui faire oublier ce moment et ce n'est pas en le sous-entendant dans une question que j'y arriverais. Mais ce que je veux surtout c'est qu'elle n'y repense pas une fois partie d'ici. C'est certainement pas le sujet qu'on a envie d'aborder avec un lycéen, non ?

J'ai l'impression de ne plus avoir mal, c'est même plus qu'une impression. Ne plus y penser m'a fait oublié la douleur. Comme toujours la présence de Mika a un effet positif, bénéfique. Rassuré de la voir à l'aise, elle me propose de faire un repas. Je ne veux pas qu'elle se dérange et elle le sait. Finalement j'accepte, après tout un repas ne nous fera pas de mal, un repas japonais même. Je ris à sa réponse réalisant que ma question était tout sauf intelligente. « Super. » Entre deux éclats de rire. Je me lève aussi mais pour m'appuyer contre le canapé. Je la regarde faire et l'écoute avec attention parler de son colocataire. J'esquisse un sourire. Content de voir qu'elle s’entend bien avec lui. C'est pas toujours facile avec les colocataires. Heureux de voir qu'elle a quelqu'un sur qui compter à chaque fois qu'elle rentre chez elle. Nouveau sourire. « Conclusion : t'es tombée sur le colocataire parfait. » J'aime l'idée qu'on puisse parler de tout et de rien mais peut être qu'elle n'a pas spécialement envie de parler de lui maintenant. Aujourd'hui tout particulièrement après une aussi mauvaise nuit. Et le tout hors de chez elle. Erreur de raisonnement, finalement le sujet est pas si mauvais. La réponse à la question suivante me fait rire aussi. Et je me dis que je préfère la voir comme ça qu'au bord des larmes. « C'est sérieux ? Je retire ce que j'ai dis il est pas si parfait en fait. » Dis-je sur le ton de la plaisanterie. Je m'avance vers la cuisine lorsqu'elle me propose de l'aider. Impossible de refuser. « Je confirme c'est une bonne idée. Marre des sushis ! » Toujours sur le même ton. Je regarde les ingrédients et l'interroge du regard pour savoir ce qu'elle veut que je fasse. Une fois les explications données je m'y met. Cuisiner donne faim, j'ai hâte que se soit prêt. A son tour elle me demande si je veux parler d'autre chose. Il n'y a pas de sujet particulier qui me vient à l'esprit. Je secoue la tête mimant un signe non. Faussement dépité. « Rien à raconter aujourd'hui. » Je soupire. « Je devrais peut être lancer une annonce de colocation pour dire autant de choses que toi, t'en pense quoi ? » Blague foireuse et regard taquin.

Spoiler:

Give me love.

Give me love like her, because lately I’ve been waking up alone, paint splattered teardrops on my shirt. I Told you I’d let them go and that I’ll fight my corner. Maybe tonight I will call you after my blood turns into alcohol. Now I just wanna hold you and feel at home.

Ji Ho & Mika

Encore une fois, Ji Ho me prouve qu'il peut me remonter le moral en toute circonstances. Il est jovial, heureux et il partage et transmet sa bonne humeur. Je suis certaine que parfois il joue, qu'il trompe tous le monde en faisant croire qu'il va bien alors qu'il se sent au plus mal. Sa maladie ne lui laisse aucun répis, je le sais mais je fais comme si de rien n'était, parce qu'il n'a pas besoin de quelqu'un qui s'apitoie sur son sort, il a besoin d'une amie qui puisse prendre soin de lui, certes, mais qui puisse également lui faire oublier qu'il est malade. J'ai le dossier médical de Ji Ho entre mes mains mais je ne veux pas qu'il me voit comme une infirmière, je veux qu'il me voit comme une amie, je voulais qu'il me voit comme plus que ça même. Désormais les choses changent, mes sentiments aussi. Je pense bien trop à Tasyr pour que ce soit anodin et je n'arrive plus à penser aux autres hommes de la même manière. Ji Ho était le gendre idéal, il l'est toujours, mais ce ne sera pas pour ma mère, tant est si bien qu'elle l'eut rencontré un jour. « Pas si parfait que ça... » Je ris et poursuit jusqu'à ce qu'il en vienne à la même conclusion que moi. Tasyr n'est pas parfait non, loin de là, mais il me convient.

Jettant les légumes dans l'eau bouillante, je me tourne vers mon ami pour l'écouter me répondre puis fronce les sourcils et affiche une nouvelle moue. « Non... Je ne pourrais plus venir chez toi et faire comme si c'était chez moi si une autre personne vit sous ton toi. Et puis... Je risquerais d'être jalouse. » C'est un de mes plus grand défaut, la possessivité. J'aime avoir l'impression que mes amis ne sont qu'à moi. Je penche légèrement la tête sur le côté et ajoute le curry à la préparation. Il faut d'ordinaire attendre plusieurs heures pour que ce plat soit le meilleur, mais Ji Ho a faim et on ne fait pas attendre un homme à l'estomac vide. « Il faut dire qu'il s'en passe des choses dans ma vie... La garde à vue, la collocation, les embrouilles sentimentales... C'est pas mon genre tout ça, je ne me reconnais presque plus... » Où est passée la Mika indépendante, volage et sans préoccupation? Je ne saurais répondre, mais elle me semble partie loin, très loin.

© Grey WIND.

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