I learned how, I didn't get why though, but at least I knew who. At that when, I saw what. And that made your first, and your last. Minh & Ethan

DON'T LET THEM PLAY YOU

On peut me reprocher beaucoup de choses, mais, je ne mens pas pendant les heures où je suis payé. Désolé de te décevoir. » Calme. Reste calme Ethan, ne t’emporte pas, tu ne dois rien casser dans la boutique ou ce sera de ta poche que ce sera décompté, alors, respire, et essaie plutôt de raisonner le gamin, ça marche bien mieux que la violence. Il soupira lorsqu’il se mit à parler en chinois. S’il ne lui fallait que ça pour le tester. « Je me gratte la nouille et je m’occupe de toi, ça ne se voit pas ? » répondit-il en cantonais. C’était bien plus utilisé que le mandarin à Hong Kong, il comprendrait rapidement d’où il venait comme ça. Un énième soupir traversa ses lèvres, retirant son tablier, le posant sur le comptoir, s’asseyant ensuite sur celui-ci.

«  Oui je réalise parfaitement. » Reprit il en chinois, pour être plus à l’aise. « Seulement, tu m’as l’air bien plus intelligent que les gamins que je vois par ici en temps normal. » Il prend une gorgée de sa bière, le regardant toujours, l’air impénétrable. Ethan n’allait pas le laisser sortir. Il s’était mis ça en tête, et ce ne serait pas possible de lui ôter cette idée de l’esprit. L’employé souriait intérieurement en entendant le portable sonner autant de fois, jetant quelques regards à l’extérieur, fusillant du regard tout celui qui croiserait la route de ses yeux au dehors.  

Ethan fit non de la tête à sa requête, continuant de boire tranquillement, croisant ses pieds, coudes posés sur ses cuisses. « No way. Ca ne marchera pas. Alors sors leur l’excuse que tu veux, mais je ne te laisserai pas sortir pour les rejoindre, encore moins avec un pack de bière pour que tu fasses l’homme, et qu’après ça, ce soit toujours toi qui te colle les délits. » Ethan le pointa du goulot de sa bouteille. « Tu y as pensé à ça ou pas ? Qu’au début ce ne seraient que des bières, après je ne sais pas, des clopes, de la weed, un peu de coke, pour finir par entrer par effraction chez quelqu’un. » Ethan penchait doucement sa tête de droite à gauche. « Je ne veux pas paraître le méchant, parce que même si tu ne t’en rends pas compte ce n’est pas le cas. Néanmoins, je te l’ai dit, tu as l’air d’être un gars intelligent, tu as l’air d’avoir vu du monde, un peu comme moi, alors, ne te frotte pas à ce genre de raclure petit, ça ne te mènera absolument pas loin. » Il rit légèrement, reniflant légèrement. « Je sais que je donne pas l’impression d’être un exemple de ce que je dis, mais, sérieusement, qu’est-ce que tu trouves d’intéressant dans des échecs pareils ? »

(c) Bloody Storm

Spoiler:

Minh en avait des choses à apprendre encore. Ethan lui, en avait appris bien trop vite. D’un côté, il enviait l’insouciance qu’il pouvait voir chez ce mignon petit étranger qui tentait de jouer les grands. Lui, il aurait tellement profité de son adolescence s’il l’avait pu. Il aurait fait les quatre cents coups, un peu comme Jie l’avait fait. Mais bon, il avait vécu la vie de son meilleur ami par procuration un peu, alors, peut-être que ce n’était pas si mal ; en tout cas, il y avait sûrement bien pire dans le monde.

« Une célébrité ? Mmh… Plus ou moins. » Maintenant, les gens à Hong Kong l’avaient sûrement oublié, ils ont certainement trouvé quelqu’un pour remplacer ses exploits. Après tout, dans l’équipe, il n’y avait pas que lui. Certes, il était le plus doué, certes, c’était lui qui avait remporté l’or, mais, Mao Di, Wang Zi ou Aaron étaient très bons aussi dans leurs disciplines respectives. Ethan n’osait même pas chercher sur internet des informations quant à l’équipe, parce qu’il avait peur d’en être blessé. Après tout, il aimait toujours autant la gymnastique, il aimait sincèrement cela, mais, il ne pouvait pas supporter la pression que l’implication amène. Est-ce que cela faisait de lui un faible ? c’était une question récurrente dans son esprit. Plusieurs fois il avait pensé à y retourner, à réessayer, mais, cela voudrait dire qu’il avait menti, à propos de son amnésie, de son ignorance. Cela ferait de lui une fraude. Pourtant, il pourrait certainement le faire, sa condition physique était toujours aussi bonne qu’il y a deux ans, si elle n’est meilleure. Un jour, avant que ce ne soit trop tard, il ferait peut-être un nouvel essai, mais avec ses propres règles cette fois.

Il regarde Minh manger encore et encore, et il se voit lui-même à son âge, faire exactement la même chose. Ethan a toujours trop mangé, et quand il grandissait physiquement, c’était pire. L’aîné rit, le plus jeune parlant la bouche ouverte le faisait en mettre partout. « Tu devrais pourtant savoir qu’à Hong Kong la variété des noms est impressionnante, tu ne connais pas ton cours d’histoire ou comment ça se passe ? » il éclate carrément de rire. Fils d’un mafieux. Son père n’avait rien d’un mafieux, mais il en avait la même hargne. Et puis, il avait oublié son vrai prénom, enfin, son prénom chinois : on l’a toujours appelé Ethan. Il mit quelques minutes à se remettre de son rire. Passant une main dans ses cheveux, décapsulant une nouvelle bière. La grimace de Minh, réaction au goût de sa bière, est digne d’une photo pour le premier avril.

« Mais comment tu fais pour avoir un tel débit de questionnement ? Tu te vois policier ? Ou commissaire ? Je pense que lors d’interrogatoires tu pourrais faire tes preuves si tu prenais un peu en muscle ! » Se penchant un peu en avant pour mettre son visage bien face à celui de Minh, il pouffe. Le cadet n’a aucune tolérance à l’alcool on dirait. « Boxeur, j’aimerais bien mais non, tu te rapprochais beaucoup plus du but avec l’option « athlète », je pense que je t’ai donné assez d’indices comme ça, si tu trouves pas, tant pis, ce n’est pas important de toute manière. » Il acquiesça, buvant encore de sa bouteille, regardant Minh du coin de l’œil. « Tu as chaud dis moi ? » demanda-t-il moqueur. Si au bout d’une bière il finit saoul, Ethan ne pourrait s’empêcher de se foutre de sa gueule, et dans toutes les largeurs.

« Oh, avec le temps tu seras moins crédule, et avec la pratique tu comprendras que les gens peuvent mentir, ça arrive de se tromper, mais ne le fais pas trop souvent, tu ne vas pas avoir un Ethan à chaque coin de rue, et encore moins dans ton bureau de commissaire pour te dire que tu merdes petit ! » Il rit, ébouriffant les cheveux du plus jeune. C’était beau de voir que l’innocence pouvait encore exister dans un monde aussi perverti, dont les gens étaient si pervertis, lui le premier d’ailleurs. Quelque chose chez Minh le poussait à lui parler encore, à tenir la conversation aussi longtemps que cela était possible. Il paraît que les personnes peuvent déterminer dans les huit secondes qui suivent une rencontre si cette personne qu’ils ont en face d’elles leur plaît ou pas, dans un sens amoureux ou pas ; Ethan savait déjà que l’amitié avec ce petit bout de melting pot était possible. Le jeune Hong Kongais acquiesce de la tête, inconsciemment, et s’en rendant compte, il finit par expliciter. « Crois moi, les Jeux Olympiques c’est beau de l’extérieur, mais quand on est dedans, on a l’impression que l’on marche sur un fil. Et dans mon domaine, c’est parfois le cas à proprement parler. » Bon d’accord, on ne marche pas sur un fil mais sur une poutre ; cela dit c’était comparable, tomber, c’était la pénalité assurée, et la place sur le podium partie en fumée. Lui avait été sur ce podium, lui avait tenu entre ses dents une médaille d’or, et lorsqu’il fermait les yeux il pouvait revivre l’euphorie de ce moment-là ; mais tous les efforts qu’il avait fournis en valaient réellement la peine ?

« Ecoute, fallait bien que je t’impressionne un peu pour maintenir ton attention, sinon, tu serais repartis avec la bande de troti pédés qui était dehors. » Oui parce que depuis quelques minutes déjà, Ethan ne les voyait plus à travers la vitrine, et c’était tant mieux. S’ils étaient restés, il serait peut-être sorti leur casser la gueule, pour qu’ils apprennent la leçon, en menaçant en prime de torturer Minh qu’il gardait avec lui. Pur mensonge, certes, mais qui aurait eu l’effet approprié. Ethan regarde Minh continuer à boire, et cache un sourire derrière sa main. Minh allait finir ivre à ce rythme, et si Ethan devait le ramener chez lui, il ne pourrait que mentir à ses parents en leur disant qu’il l’avait trouvé ainsi dans la rue. Quoi que non, il avait un peu plus de cœur que ça, il le renverrait chez lui après qu’il ait dessoulé ; il risquait la castration si étant mineur il rentrait soul. « Shao Le ! Crie pas ! C’est bon, mon nom c’est Wang, Wang comme le roi, d’accord ? Mais j’avoue que Corleone ça aurait claqué ! » L’aîné des deux explose de rire, finissant la bière entre ses mains. Est-ce que dans son début d’ivresse Minh comprendrait-il qui il était ? De toute manière, ça ne semblait pas être si percutant. Ethan réussissait donc à se faire oublier de la gente Hong Kongaise, c’était ça de gagné.

Il se leva alors du comptoir, se dirigeant vers un coin de la boutique, se plaçant à un endroit précis, se redressant sur la pointe des pieds pour atteindre la caméra qui pointait le rayon alcool du magasin. Ethan la poussa de façon à ce qu’elle filme un tout autre rayon, et alla prendre deux autres bouteilles de bière, puis, après les avoir soigneusement placées derrière le comptoir, non surveillé d’ailleurs, ce qu’il trouvait stupide, il refit le même manège, dans le sens inverse. Il ne fallait pas croire qu’il faisait ça souvent, mais, c’était une bonne occasion de le faire. « Tu as encore soif Didi ? »

« Non Wang, le caractère Wang signifie « roi » mais… » Oui, il était Roi du podium. Voilà pourquoi il n’aimait pas parler de ça. Dans le fond, ça lui manquait, ça lui manquait terriblement de montrer ce qu’il savait faire devant le jury. L’excitation et l’adrénaline de ces moments là lui manquait. La concentration, la transe dans laquelle il se plongeait lorsqu’il tenait les anneaux. La précision avec laquelle il exécutait ses mouvements sur la poutre. Ou encore l’agilité avec laquelle il réalisait ses figures et acrobaties sur le tapis. Ces choses là lui manquaient. Et plus il y songeait, plus il se voyait reprendre la compétition. Seulement ça voulait dire rentrer à Hong Kong, ça voulait dire inventer une nouvelle supercherie, faire croire qu’il avait retrouvé la mémoire alors qu’il ne l’avait jamais perdue. Ca voulait dire retourner dans un monde d’obligations et restrictions, et après avoir goûté à la liberté, à cette liberté qu’il s’était approprié à Suwon, il n’était pas sûr de pouvoir accepter les ordres une nouvelle fois. Ses performances étaient encore meilleures à présent… Et s’il prenait la nationalité coréenne ? Peut-être qu’ici en Corée, ils seraient un peu plus flexibles avec lui, au vu de son rang dans le monde de la gymnastique… Mais, si c’était le cas, le monde serait bien trop beau. Il ne fallait pas trop rêver non plus. « On dirait que t’as oublié comment on se présente en chinois toi, c’est parce que ton nom ne s’écrit pas en hanzi ? » Après tout, en chinois, on précise les caractères qui composent son nom pour éviter les malentendus.

Ethan sourit. Minh était un peu plus ivre à présent, et il était juste, extrêmement mignon. L’aîné pinça les joues du plus jeune. « Va lève toi et va te prendre une bouteille de thé bien frais, ça te fera du bien, et prépare toi à filer, mon collègue ne va pas tarder à arriver. » Il regarda l’heure, il serait là d’une minute à autre. « Et tu vas pas prendre le bus pour rentrer, si tu rentres comme ça, tu vas te faire étrangler par tes parents, et moi je serai poursuivi pour laisser un mineur boire, chez moi ce n’est pas loin. » Non parce que Minh avait sûrement fait le mur ou une connerie comme ça, et s’il rentrait bourré, il serait aussi silencieux et discret qu’un mammouth dans une boutique de miroirs. De sa poche, Ethan rajouta dans la caisse le prix de ce qu’ils avaient consommé dans le magasin, les bières exclues. Et puis, s’il manquait encore de l’argent, il savait pertinemment que son collègue le rajouterait, parce qu’il penserait que c’est de sa faute ; le collègue en question était bien trop tête en l’air et pourtant honnête qu’il couvrait à chaque fois les erreurs du Hong Kongais. Ethan fit juste le tour du magasin pour vérifier que tout était bien en ordre et rangea son tablier proprement, avant de rouvrir la porte dudit lieu. Sortant la tête, il vit l’employé qui allait le remplacer arriver en moto. « Bon Didi, tu arrives à marcher ou il faut que je te porte ? » demanda-t-il en riant.

Ah il était donc vietnamien. De là donc sa teinte de peau. Mais Ethan ne manqua pas de remarquer que dans son ivresse quelque chose ne tournait pas rond chez Minh. Il semblait penser à des choses tristes, ou blessantes, ou quelque chose dans ce style là du moins. Minh était-il du genre ivre dépressif alors ? Ethan en eut un petit malaise de conscience à cette pensée, il aurait peut-être pas dû le faire boire.

En tout cas, il rangea ce qu’il avait sorti sur le comptoir, passant même un cop de balais près de l’entrée et finit par ranger correctement son tablier. S’il pouvait éviter les remarques de son collègue, il le ferait. Le jeune homme se mit en tête de trouver une solution pour Minh. Le plus jeune ne pouvait pas rentrer comme ça, mais s’il le ramenait chez lui, il lui faudrait une excuse au matin pour qu’il ne se prenne pas un sacré savon par ses parents. Soyons réalistes, on est pas aux états unis d’Amérique, aucun parent digne de ce nom ici à Suwon dirait amen à son enfant lycéen ayant découché la nuit dernière. Du moins, Ethan lui en tant que parent, il ne dirait certainement pas amen. Celui prenant la relève arrive alors, et le Hong Kongais le salue, lui disant que tout est en ordre et qu’il n’a pas à s’en faire. Le nouvel arrivant est l’archétype du mec qui se laisse marcher sur les pieds. Ethan le savait en première année à la fac, et chez les Petalous ; en somme, rien de grave à craindre. De toute manière, l’ancien athlète ne laissa pas le temps au nouveau de répliquer, il avait déjà pris son sac à dos et sa casquette et sorti de la boutique pour rattraper Minh.

Pressant un peu le pas, il se mit à marcher à coté de lui. « Oui ? » Répondit-il simplement en entendant son prénom. Il tourna la tête pour voir son cadet et fronça les sourcils. « Hey non pleure pas Didi… » Le côté fraternel d’Ethan se réveille en force. Il a l’impression de voir son ancien ami Mao Di. Oui, ce petit garçon de Shanghai qui se mettait à pleurer quand il ratait son exercice. Minh faisait la même moue que Mao Di, il avait la même expression sur le visage. Ethan ajusta son sac sur son épaule avant de prendre le plus jeune contre lui d’un bras, tapotant doucement son dos.

L’aîné esquissa un faible sourire à la question. « tu as l’alcool mauvais on dirait… rien de très grave, ça va passer. » Ethan passa une main dans les cheveux du vietnamien. « Voilà ce que je te propose, enfin, non je te le propose pas, je te l’impose. Tu passes la nuit chez moi et demain matin je te raccompagne chez toi, je dirais à tes parents que j’ai eu besoin de toi au lycée très tôt pour quelque chose dont je trouverai exactitude dans la nuit, et je prendrai la responsabilité, ça atténuera leur réaction. Aller, reprends toi, un homme ne pleure que devant sa mère et sa femme, sache-le. »