inspiration is what you are to me

Ça touchait toujours noah lorsque charlie l’invitait chez lui, car il savait à quel point le jeune homme ne dévoilait son petit monde qu’à un nombre très réduit de personnes. quelque part au fond de son estomac vivait cette sensation agréable, celle d’avoir l’impression d’être assez important aux yeux de quelqu’un pour avoir droit à des exceptions. Exceptions serait même un euphémisme car l’ainé s’est toujours montré adorable avec lui, cherchant à l’aider à lancer sa carrière dans l’art, en lui donnant divers conseils que jamais personne n’aurait osé divulguer sous principe du secret professionnel, non vraiment, charlie est un être que noah ne pourra jamais remercier assez pour toutes les choses qu’il a fait pour lui. Ce sentiment en est tellement puissant que parfois il lui arrive même de penser qu’il en profite, de son point de vue il n’en fait vraiment pas assez et ça le dérange au plus haut point car après tout, il tient énormément à son ainé. Sans compter son meilleur ami, il est quasiment sûr que le jeune artiste est l’une des personnes à qui il tient le plus, et pourtant, ils ne se connaissent pas depuis si longtemps que ça, mais leur relation est tellement fusionnelle qu’il n’a pu s’empêcher de s’attacher à cette bouille qui lui a rappelé plus d’une fois lui-même.

Ce jour-là il était partit plus tôt du centre-ville pour se diriger vers le quartier préféré des bluing à savoir yeongtong-gu. il lui arrivait souvent d’emprunter cette route maintenant, car il faut bien admettre que les deux jeunes artistes ont désormais du mal à laisser des jours les séparer. Ce serait une bonne chose qu’il invite l’ainé en retour car jusque-là, charlie n’a jamais posé le pied chez lui. Regrettable n’est-ce pas. Comme à son habitude, noah s’était arrêté en chemin pour prendre un pack de bière qu’ils videraient ensemble pour sûr en discutant autour d’une bonne clope. Ce dernier a d’ailleurs profité de son arrêt pour faire le plein car il devenait accros à cette drogue bien plus vite qu’il ne l’aurait imaginé. Comme quoi l’ainé avait raison, une fois qu’on y goute on ne peut plus s’en passer. C’est donc avec la cigarette au bec, le sac sur le dos et son chien dans les bras qu’il frappa à la porte du duplex de son ami. Comme celui-ci lui avait demandé un peu plus tôt dans la journée, il avait apporté avec lui dans son sac tout ce dont il aurait potentiellement besoin, comme ses affaires habituelles de dessin, son nécessaire d’écriture mais surtout beaucoup de feuilles puisque malgré le fait qu’à chaque fois qu’ils se voient tout se passe de la manière la plus cool et tranquille qu’il soit, ils discutent tout de même parfois, non, souvent de choses importantes à leurs yeux. Quand la porte du duplex s’ouvrit, il lui tendit une poche avec un sourire aux lèvres « j’ai apporté du kimchi en passant »

Noah ne fut pas surprit d’être accueillit par la vision d’un charlie recouvert de taches de peinture honnêtement, pas le moindre du monde. C’est tout juste s’il y avait même payé attention car après tout quoi de plus banal pour un artiste que de finir par ne plus ressembler à rien ? Simple b.a-ba. Il sourit en coin car il ne fut pas plus surprit par la petite tape qu’il reçut, à ça aussi il était habitué.  « Dis-moi quelque chose que je ne sais pas déjà. » Ah le sarcasme. Comme à son habitude il le suivit tant bien que mal à slalomer entre ses chevalets et autres meubles entreposés ici et là pour déposer finalement ses affaires sur sa table de travail. Il fit descendre nolan sur une des chaises et en profita pour s’allumer une nouvelle clope et pour sortir le pack de bière qu’il avait acheté, en offrant une à charlie par la même occasion. Ce dernier le présenta rapidement devant trois nouveaux tableaux qu’il n’avait encore jamais vu. Étant donné l’état de son atelier et de lui-même, noah en déduit que l’artiste n’avait pas arrêté de la journée. Avec les détails ajoutés par ce dernier, il ne put que hocher la tête avec reconnaissance, l’idée en elle-même était brillante. On pouvait clairement voir que beaucoup de temps et de passion avaient été donné pour chaque tableau, mais aussi pour l’idée générale, à savoir plusieurs interprétations possibles. Il expira la fumée de ses poumons et prit alors la parole.  « Pas mauvaise, beaucoup de travaux à rendre mais ça me plait. »  Parler de lui n’était pas vraiment ce qui l’intéressait de plus, à vrai dire plusieurs choses lui traversaient l’esprit. L’une plus importante que l’autre à en juger les apparences.  « Pour en revenir à ces tableaux, c’est très recherché bravo. Tu pourrais peut être m’en dire un peu plus, comme par exemple, me donner ton interprétation personnelle en tant qu’artiste. Il me semble que c'est important. » Il jeta un dernier coup d’œil à ses œuvres puis vint rejoindre la table pour ne pas que les cendres de sa cigarette ne salissent son sol. Nolan reprit naturellement place sur ses genoux pendant que lui-même prit une gorgée de sa boisson.  « Tu penses les inclure pour ta prochaine galerie au fait ? Car jusque-là c’est vrai que tes œuvres sont en général très variées. »  Pas que ce soit une mauvaise chose au final, au contraire, avoir divers styles n’est qu’un avantage dans ce métier, et en y repensant, la diversité devait être le point noir de noah. Tandis que son ami prit la parole, il en profita pour sortir les affaires de son sac et les posa sur la table sans pour autant le quitter du regard. Il ouvrit son carnet habituel, saisit le crayon coincé derrière son oreille et écrivit quelques notes en continuant d’hocher la tête aux explications de charlie. Elles pourraient toujours servir à un moment donné. Quand il reposa le carnet sur la table pour reprendre sa cigarette, celle-ci était déjà terminée, il soupira et prit au final une nouvelle gorgée de bière.  « Et puis dis-moi Charlie, quelque chose me dit que tu as encore négligé ton repas du midi, tu me fais assez confiance pour que je te cuisine au moins ton repas du soir ? » Il sourit en coin à sa remarque, ce n’était pas dans ses habitudes de materner ses amis mais l’ainé devait prendre soin de lui. L’idée d’apporter du Kimchi ne lui était venu qu’en cours de route mais au final il avait eu une bonne idée.

Beaucoup de gens dans le milieu de l’art l’admirait. Ils parlaient d’un don, d’une sensibilité extraordinaire et d’une maturité hors norme. Il semblait qu’il avait juste ça dans le sang. Charlie lui-même le ressentait ainsi. Ses pinceaux représentaient toute sa vie et plus encore. C’était le reflet de son âme. La seule personne qu’il laissait pénétrer ainsi dans son antre avec des œuvres pas terminées c’était Noah. Il ne demandait conseil à personne d’autre et refusait tout bonnement de montrer quelque chose d’inachevée. Mais il aimait le regard que Noah pouvait porter sur son travail. Il était plus jeune que lui. Il avait d’autres idées et une sensibilité différente de la sienne. Si il apportait beaucoup au jeune homme ce dernier ne réalisait sans doute pas qu’il faisait également progresser son ainé. Rapidement, plutôt que de parler des cours de Noah, ils revinrent aux tableaux qu’il lui avait montrés. Ces derniers temps Charlie peignait énormément. L’amour l’inspirait-il ? Il n’en avait aucune idée mais si en temps normal il était déjà très productif là c’était juste incroyable. Il en avait oublié de se nourrir. Lorsque Noah lui demanda son interprétation personnelle le pauvre américain ne sut pas tout de suite ce qu’il devait répondre. Il posa sa main sur hanche et regarda longuement ce qu’il avait peint. Qu’est-ce qu’il avait voulu dire ? Lui-même l’ignorait. C’était juste venu. Heureusement il avait un regard très critique sur ce qu’il peignait alors les informations arrivèrent peu à peu alors qu’il buvait un peu trop rapidement sa bière. « Les trois ensemble c’est un tout. C’est tout ce qui nous entoure. Toi t’es au milieu et autour de toi tout bouge. Un seul tableau c’est toi ou des parties de toi. » Charlie plissa les yeux. Il songea qu’il aurait pu utiliser une autre technique encore et qu’il devrait trouver un moyen de lier les trois de façon plus significative mais qu’ils puissent toujours former une unité qui ferait partie d’un tout. « Chaque partie c’est ce qui te constitue. » Il pointa un premier tableau. « C’est la souffrance. » Puis le suivant. « La solitude. » Et le dernier. « Ou la peur. » Il haussa les épaules. D’une certaine manière en parlant ainsi il se dévoilait un peu plus à Noah. Il tira sur sa clope et bu une gorgée de bière. « Et tout ensemble c’est le bonheur. » Paradoxal, n’est-ce pas ? Il tourna la tête vers Noah avec un petit sourire en coin. Il était fier de ce qu’il avait fait et de ce qu’il expliquait. Charlie connaissait ses compétences. « Parce que pour être heureux faut lutter contre le reste. » Il haussa ensuite les épaules comme s’il venait de dire la chose la plus naturelle du monde. Il pensa un instant que certains allaient sans doute interpréter ces trois tableaux comme des représentations de sa fausse dépression. Il s’en fichait. L’important était ce que lui voyait. Il posa ses pinceaux et s’installa à côté de Noah. Il caressa la tête de son petit chien tout en souriant. Peut être qu’il devrait lui aussi adopter une boule de poils ? « Je pense les inclure oui. J’ai besoin de partir dans tous les sens. Je veux pas me mettre de limite. J'ai appris et vu des tas de choses. Ce serait trop bête de pas tout montrer. J’imagine que tu comprends ? » Il en était certain. Noah était comme lui. Il pensait comme lui, respirait comme et presque peignait comme lui. « Comment voulais-tu que je mange ? J’ai pas lâché ce truc là de toute la journée. J’ai encore rien fait pour l’expo et je dois avoir vingt appels en absence de mon agent. Au pire on aurait commandé un truc ! Mais comme t’es parfait on a du kimchi. » Il éclata de rire et vida sur ces belles paroles sa première cannette de bière. La première et certainement pas la dernière de leur longue soirée. En général ils finissaient dans un sale état. Ils s’endormaient dans le même lit comme deux ivrognes ou parfois à même le sol. Mais ce genre de soirée lui faisait du bien. Parler avec quelqu’un comme lui soulageait un poids sur ses épaules. Celui de l’artiste persuadé qu’il va finir fou et seul. « Mais en fait j’ai besoin de toi. Je veux qu’on fasse un truc ensemble. Un truc à deux. Une toile énorme. » Il écarta les bras pour mimer la chose. « Genre au moins du 5x5 mètres tu vois. » Il écrasa sa clope dans le cendrier et en prit aussitôt une deuxième parce que quand il parlait avec autant de vivacité il se sentait comme obligé. « Je veux qu’elle fasse partie de ma prochaine expo celle que j’ai pas encore préparé. » Il lui adressa un petit clin d’œil car il était persuadé que cela allait lui faire plaisir.

A ses yeux Charlie n’était désormais plus qu’une simple inspiration. Il était devenu bien plus que cela. Un rôle model serait le terme exact. Pour être même très précis, son rêve se résumerait à prendre l’exacte sentier qu’a choisi auparavant son ainé. La seule chose qui les différencierait probablement ? Le talent. Noah à sa connaissance n’est pas forcément pessimiste, mais malgré son caractère jugé gamin, sait parfaitement ce qu’il vaut, connait ses qualités, ses défauts, sait ce qui lui manque, et, bien souvent c’est son ainé qui lui fait réaliser oh combien il est loin d’être un artiste complet et à la hauteur. Noah sait très bien qu’il a des techniques, des connaissances, une très grande imagination et créativité, mais Charlie à côté de lui est tellement meilleur. Si on l’entendait dire, on lui dirait probablement qu’il a bien plus d’expérience, plus d’années à son actif, mais ça ne suffirait probablement pas à le convaincre. Charlie avait surpassé le stade de l’inspiration, et le cadet n’était pas réellement sûr de savoir ce qu’il était devenu à ses yeux, mais ce dont il était cependant sûr, c’est que s’il arrivait un jour à ne faire qu’un tiers de ce qu’a accompli son ainé jusqu’à aujourd’hui, il lui en serait bien plus que reconnaissant.

Noah resta extrêmement silencieux et attentif durant l’explication de l’ainé. Même si cela s’était perçu qu’il n’y avait pas réellement réfléchi, ce qu’il lui répondu fut plus que satisfaisant, cela avait même beaucoup de sens et de profondeur. Au fur et à mesure qu’il en rajoutait, Noah hochait de la tête en admirant de sa position les trois œuvres en face de lui. « Tu aurais sérieusement du faire de la poésie, parce que crois-moi Charlie, c’est très beau, profond et incroyablement réaliste. Et je ne peux qu’approuver ce que tu as dit précédemment. » Il ne se permit pas de juger et de rapprocher les paroles de son ainé à des évènements qui auraient pu lui arriver, ce n’était non seulement pas son rôle en tant qu’ami, mais il ne devait pas non plus être la meilleure personne pour pouvoir critiquer les expériences du jeune artiste. Jusque-là il n’était au courant que d’une chose, qu’il était comme lui, que la déception l’avait mené à rester sur ses gardes, il n’avait donc absolument aucun droit de se faire une quelque conque hypothèse sur son interprétation. Il lui sourit néanmoins sincèrement tout en allant s’installer à sa table. Sachant que sa bouteille de bière n’allait pas durer bien longtemps il lui en sortit une nouvelle du pack. Heureusement qu’il restait les plus grands à la superette. « Tu as raison, je n’ai jamais compris personnellement l’intérêt de coller un thème à une galerie. Ne serait-ce pas même le but d’une galerie de montrer des œuvres diversifiées ? » Il haussa un sourcil en même temps qu’il se ralluma une clope. Ils s’étaient tous deux réellement bien trouvés, jusque-là, Noah n’avait jamais connu quelqu’un qui le comprenait aussi bien que Charlie. Avec lui il n’a jamais aucune gêne à avoir, il peut toujours parler de tout ce qu’il a sur le cœur, sur la conscience, sur les épaules, et l’ainé sait tout aussi bien qu’il en valait de même pour lui. Le cadet ne le critiquerait ou jugerait jamais, son rôle était d’être toujours présent pour lui, de l’écouter, de le rassurer, et au pire des cas, de lui proposer des options qui lui semblerait à ses yeux les meilleures, mais jamais il ne le forcerait à quoi que ce soit. « Heureusement que je suis là pour prendre soin de toi sérieusement. C’est vrai qu’on aurait pu commander une pizza mais ça je le réserve pour la fois où tu poseras les pieds chez moi mon grand, tu es encore jamais venu diantre. » Il lui fit du sourcil avec un grand sourire plaqué aux lèvres. Ce sourire grandit même d’avantage lorsque l’ainé continua de lui dévoiler ses envies. Noah ne lui a probablement jamais dit à voix haute mais il trouvait réellement adorable et touchant le fait que Charlie lui porte autant d’intérêt et d’attention. Il n’aurait jamais imaginé que quelqu’un puisse vouloir faire une quelque conque collaboration avec lui. Aujourd’hui était peut-être le jour pour mettre une voix sur ses sentiments. « Réellement je voudrais te remercier, ça me touche énormément que tu veuilles partager autant de moment en ma compagnie. Je ne l’oublierai jamais. Et comme tu dois déjà t’en douter j’adorerais faire ce giiigantesque tableau avec toi. » Il mima de manière encore plus exagérée la taille de l’œuvre tout en riant, sa cigarette au bout des doigts. Grâce à sa proposition, son sourire ne quitta plus ses lèvres, pas que ce soit une mauvaise chose, au contraire, ça venait de lui ensoleiller sa journée. « Et tu sais que si tu as besoin pour ta prochaine expo tu peux toujours m’appeler à n’importe quelle heure hein. Tu sais que je m’en fiche de l’heure si c’est pour t’aider à organiser ou fignoler quoi que ce soit. » Son regard était planté dans le sien de telle manière à ce qu’on puisse y lire la sérosité et la sincérité de ses propos. Noah a toujours débordé de générosité pour ses amis, si bien que souvent il s’en est oublié lui-même. Charlie n’échappait pas à la règle, il avait même un avantage sur la plupart de ses fréquentations pour être une si bonne personne avec lui. Il irait jusqu’à sacrifier des heures de sommeil si cela signifiait aider son ami à aller toujours plus loin dans son rêve. « Bon, et si je commençais à préparer ce diner. Si tu as faim évidemment, ce que j’imagine. »

Charlie prit la remarque de son ami Noah comme un véritable compliment. Il aimait beaucoup la poésie en plus. Depuis quelques temps ses œuvres parlaient toutes plus ou moins de la même chose. Elle dégageait cette souffrance marquée par l’espoir d’aller mieux et la volonté de continuer d’avancer. Il essayait de mettre tout ça en œuvre. Il tentait d’apprendre à s’ouvrir de nouveau à quelqu’un qu’il ne connaissait pas. Est-ce que tout ça se lisait dans ses tableaux ? Il n’en avait aucune idée. Cependant il était curieux. Il avait peint ça alors il voyait ce qu’il ressentait mais sans doute que Noah avait une vision des choses bien différentes. Il voulait l’entendre. Il aimait connaître son avis. « Tu vois ça comment toi ? » Il plissa les yeux. Il était intéressé et attentif à ce que Noah lui disait. Ce mec là du haut de ses dix huit ans avait plus de maturité que lui n’en avait à son âge. Il s’en rendait bien compte. Des détails les différenciaient tout de même mais sinon ils auraient pu être frères que ça n’aurait étonné personne. L’avantage c’est qu’il pouvait être totalement lui-même en sa compagnie. Il n’avait pas besoin de refreiner son imagination débordante ou de rester sage. Noah ne le trouvera jamais bizarre. Pas plus qu’il ne se moquerait de lui s’il se teignait un jour les cheveux en bleu. Ils se comprenaient comme si leurs cerveaux étaient reliés. « Je suis trop peu organisé pour ça en plus. Mieux vaut ne pas me donner de thème. Puis les gens me connaissent maintenant. » Charlie avait cette réputation d’artiste capricieux et excentrique en plus de celle d’être d’un prodige. Cela plaisait à une majorité mais il y en avait tout de même quelques uns pour le critiquer. Il y a toujours quelqu’un pour vous dire que ce que vous faites n’est pas bon. L’américain éclata ensuite de rire en l’entendant lui dire qu’il avait de la chance de l’avoir. Il ne le niait pas mais la situation avait quelque chose de comique. Un gamin de dix huit ans qui s’occupe de lui. Il serait peut être temps qu’il grandisse un peu  ce niveau là. « Je ne viens pas parce que tu ne m’invites pas voyons ! J’ai très envie de voir ton bordel à toi en plus. » Il était persuadé que chez Noah ça devait être au moins autant le désordre que chez lui. Sans doute pas plus parce que Charlie battait tous les records. Il y en avait jusque dans sa salle de bain parfois. Mais il aimait travailler comme ça. Surement que certains ne pourraient pas mais lui se sentait mieux ainsi entouré de tous ses bébés. Il lui parla ensuite du projet qu’il voulait réaliser avec lui. C’était bien la seule chose qu’il était sur de vouloir pour sa prochaine exposition. Il savait même déjà où il voulait le mettre dans la galerie. Cela faisait un moment que ça le travaillait. Il avait déjà emmené Noah avec lui à plusieurs reprises en le présentant aux grands du domaine mais sans avoir l’occasion de leur montrer de quoi il était capable. Ainsi il allait en quelques sortes le présenter un peu mieux. Il savait qu’il allait accepter. « Je veux pas te faire peur par contre mais... c’est dans deux jours hein. » Il afficha une petite moue désolée mais il prévoyait toujours tout au dernier moment. Noah devait sans doute avoir l’habitude à force. « Mais on peut commencer ce soir. » Il pointa en effet du doigt une grande toile vierge qui trônait au fond de la pièce contre un mur. Elle était légèrement plus grande que les dimensions qu’il venait de lui donner mais au moins il avait prévu ça. Il fut touché que Noah lui propose son aide. Il le faisait souvent et il l’appelait presque à chaque fois à la rescousse mais cela lui faisait réellement du baume au cœur. Il le considérait comme bien plus qu’un ami ou un élève. Il était comme son petit frère avec les inconvénients en moins que le véritable avait. « Bah du coup comme tu vas participer tu pourrais penser à d’autres de tes travaux que tu voudrais exposer. » Il donnait le coup de grâce car il avait prévu de lui laisser tout un mur pour y mettre certains de ses dessins ou autres. Son agent n’était pas encore au courant et de toute façon Charlie faisait ce qu’il voulait. « Et pour me remercier tu vas me faire à manger. » Il lui tira la langue et se leva avec sa bière. Ils slalomèrent ensemble entre les tableaux jusqu’à la cuisine. Là Charlie posa ses fesses sur le plan de travail. Prêt à observer son cadet préparer le repas.

Noah réfléchit quelques bonnes minutes à l’interprétation qu’il pourrait donner à l’œuvre de l’ainé. Formuler ses pensées n’a jamais été une chose simple, au contraire, il était horrible à ça, mais il ferait de son mieux pour son ami. « Lorsque j’ai posé mon regard sur l’ensemble des trois tableaux, j’ai pensé que chacun représentait une étape de la vie. » Il inspira puis expira rapidement la fumée de ses poumons pour continuer son explication. « Personne ne choisit son destin, et nous prenons tous des chemins différents, cependant, certaines étapes de la vie nous sont communes à tous. Et c’est ce que j’ai vu à travers ces tableaux. » Son regard vint alors se plonger dans celui de l’autre avec une expression pensive. « Un individu ne pourrait être concerné que par une partie de cet ensemble, tandis qu’un autre pourrait être cerné par deux, et un autre trois. C’est ce que je pense. » Un sourire se dessina aux coins de ses lèvres, son interprétation ne devait pas être la plus originale qu’il soit mais au moins, de son point de vue, ce qu’il lui avait répondu avait du sens et beaucoup de réalisme. Noah était satisfait. « Crois-moi, on ne m’a jamais suspecté que je sois un artiste jusqu’à ce qu’on voit mon atelier ou au moins ma chambre. » Malgré sa manie de dessiner, peindre, écrire et composer un peu partout, il ne se trouvait pas si bordélique que ça. Il ne s’étendait pas non plus jusqu’à sa cuisine ou salle de bain. Ces derniers temps, avec l’arrivé de l’été et de la chaleur, l’endroit où il appréciait créer c’était sur sa terrasse, en face du paysage ; cela lui permettait de se relaxer, de faire le vide et de trouver facilement l’inspiration. Mais là n’est pas le sujet. Deux jours semblaient suffisants pour tout boucler s’ils se montraient performants. Noah acquiesça rapidement la tête à la remarque de Charlie. Il avait bien apporté ses affaires pour quelque chose après tout. Le cadet quitta donc sa chaise avec la poche contenant le kimchi pour rejoindre la cuisine de l’ainé. « Dépêchons nous de manger alors, ça va que j’ai progressé côté cuisine. » Il sourit en coin car cela n’était pas un mensonge. A l’époque, laisser Noah derrière des fourneaux était du domaine du suicide, mais la vie en tant que célibataire et adulte pas tant que ça responsable lui avait permis de se perfectionner. « Et oui, j’ai déjà une idée des œuvres que j’aimerais exposer. Quelques peintures, esquisses et portraits que j’ai terminé il n’y a pas si longtemps et qui me tiennent vraiment à cœur. » C’est avec agilité qu’il fit la préparation du plat sous le regard attentif du jeune artiste, et bien rapidement il vint le rejoindre le temps que la nourriture cuise. « Le temps de cuisson peut être long alors soit on essaye d’organiser un plan pour la galerie, soit on dresse une liste pour les œuvres, soit on attaque le monstre maintenant. Tu as le choix mon grand. » Il lui sourit en coin tout en sortant une nouvelle bière du pack. La montre à son poignée lui indiquait qu’il leur restait encore pas mal de temps, considérant le fait qu’ils n’avaient jamais bien peur de s’endormir très tard dans la matinée au premier endroit disponible. Il sortit de son sac deux petites gamelles en plastique qu’il remplit d’une part d’eau et de l’autre de croquettes pour Nolan qui méritait lui aussi de se régaler. « Personnellement je pense qu’on est capable de faire plusieurs choses à la fois. Après tout, il y a tant de talent en nous. » Un rire échappa ses lèvres avec sarcasme. Son popotin quitta une nouvelle fois sa chaise pour aller remuer la préparation et s’assurer que tout se passait pour le mieux. Une fois ceci fait, il vint déposer ses mains sur les épaules de son ami pour lui donner un petit massage. « Alors monsieur ? »

L’explication de Noah lui parlait énormément. Le sens qu’il donnait regroupait de manière plus générale mais aussi plus claire ce qu’il lui avait raconté juste avant. Si bien qu’au fur et à mesure qu’il lui dévoilait le fond de ses pensées un sourire se glissa sur son visage. Un sourire qui se mit à grandir. On y lisait de la fierté mais surtout du bonheur d’être compris ainsi. Cela voulait aussi dire que ses tableaux dégageaient les bonnes émotions et qu’il était dans la bonne voie avec ces derniers. Il finit par hocher la tête à ses dernières paroles. « Noah, je pense que dans une autre vie nous avons partagé la même âme. » Il en était même persuadé. Comment expliquer une telle connexion sinon ? Certes Noah ne dégageait pas vraiment l’image d’un petit artiste excentrique enfin il en avait tout de même quelques signes avant-coureurs et probablement que s’il ne l’avait pas croisé dans un cours d’art il ne se serait pas douté de son talent. Mais bien souvent les meilleurs, ceux qui ont le don, qui ont ça dans le sang sont cachés. « Personne ne croyait en moi au début tu sais. Mes parents pensaient juste que je faisais le rebelle avec mes bombes et mes graffitis. » Il secoua la tête en repensant à cette période de sa vie et au nombre de fois où son père avait dû le chercher au commissariat. Il ébouriffa les cheveux de son ami artiste comme s’il était un grand frère et dieu sait que ce rôle lui allait mal même s’il l’endossait fièrement pour Noah. « Le vrai talent est caché. » Peut être était-ce pour cette raison qu’il n’invitait pas beaucoup de monde chez lui. Pour se préserver, pour se ménager et pour éviter de souiller ses œuvres du regard de certaines personnes comme ses mecs qui pouvaient n’en avoir qu’après son argent ou son petit cul. Noah était différent. Il passait avant les autres. Il était une sorte de vip. Il pensa qu’en revanche il n’avait aucun talent en cuisine. Du haut de ses vingt-quatre ans il n’était toujours pas capable de se faire de bons petits plats. Il achetait des congelés, commandait des pizzas ou mangeait au restaurant. De ce fait Noah ne pouvait que l’impressionner. « Ce sera toujours plus mangeable que si moi j’te cuisine un truc. » Il l’observa attentivement pendant toute la préparation et ne put s’empêcher de l’admirer. Il aimerait au moins savoir faire ça. Il devrait s’y mettre plus sérieusement. Quand il lui parla organisation Charlie retourna dans la pièce principale à la recherche du plan de la galerie. Il le trouva au milieu d’autres papiers plus ou moins importants le posa sur la table et attrapa un surligneur qui trainait là. Il surligna tout un mur avant de poser son doigt dessus. « C’est ton mur. T’en fais ce que tu veux tant que ça ne jure pas avec le reste. Et là on met l’énorme toile. » Il surligna un autre mur qui était un peu plus petit et qui allait pile suffire à accueillir leur énorme œuvre commune. Pendant l’absence de Noah, Charlie s’empara d’une feuille vierge. Il observait ses tableaux dans la pièce et choisissait ceux qu’il voulait exposer. Il les classait même. Il fallait beaucoup de temps pour le mettre au boulot mais Charlie restait un garçon très méthodique avec une façon de travailler très carrée. En sentant les mains de Noah sur ses épaules il sursauta. Il l’attrapa par le poignet pour le trainer en avant et limite lui mettre la tête sur la feuille. « T’en penses quoi ? » Pendant ce temps il notait le placement de ses tableaux. Il s’arrêta un instant le stylo en bouche et jeta un coup d’œil à leur grande toile vierge. «  Il faut qu’on la déplace ici pour avoir plus de lumière pour travailler après. » Ils allaient donc devoir faire de la place. Charlie se leva et poussa beaucoup de ses chevalets ainsi que d’autres affaires qui trainaient ici ou là. Il pointa le doigt du mur pour signifier à Noah qu’ils allaient la poser contre. A deux ils portèrent l’énorme toile pour ne surtout pas l’abimer. « Tu vois quoi ? » Ils avaient de quoi faire. Une longue nuit en perspective.

Noah sourit grandement à sa remarque. C’est une évidence que dans une autre vie les deux artistes devaient partager la même âme. C’est impossible que tant de similitudes et de points communs surviennent de nulle part comme ça. Et d’un côté, Noah se sentait fier que l’élu soit Charlie. L’ainé a toujours représenté beaucoup pour lui ; si parfois il lui sert de modèle, d’inspiration, il lui arrive aussi de servir de soutient, presque comme un grand frère qu’il n’a jamais eu, et c’est un sentiment qui lui fait bien souvent chaud au cœur. Majoritairement car il est l’une de ces rares personnes à être en mesure de le comprendre, mais également car hormis ses sœurs, peu se sont préoccupés de lui comme l’a fait l’ainé. Ces raisons suffisent à placer Charlie parmi les personnes qui comptent le plus à ses yeux et c’est toujours risqué d’oser dire du mal de lui en face du cadet, toujours. Un rire échappa ses lèvres suite aux propos de l’autre. Pour le coup il avait eu la vision d’un Charlie, tout jeune faisant des graffitis tel un adolescent pré pubère en pleine période de rébellion. Cette image fut quelque peu comique dans sa tête et il ne put se retenir de le montrer. « J’avoue que je ne t’aurais pas imaginé ainsi. Tu aurais des photos rien que pour rire un bon coup ? » Bien que fier de sa remarque, ce que disait le jeune artiste était bien vrai. Le talent n’est pas forcément quelque chose qui se remarque. Dans son cas, personne n’a jamais rien soupçonné jusqu’à ce que Noah commence à acheter des carnets, des crayons et que sa chambre n’en ressemble plus à une mais plutôt à un atelier bordélique. Dans l’option du dessin et de la peinture, car du côté de la musique c’est une toute autre histoire. Il a toujours baigné dedans, ce pourquoi ça n’a jamais choqué qu’il soit doué et décide de faire de sa passion son métier. Un peu comme l’ainé. Il avait vraiment de la chance de pouvoir pratiquer, exposer ses œuvres, tenir des galeries. Et grâce à lui, Noah avait le privilège d’en découvrir les différentes facettes, comme présentement, en commençant par l’organisation. Ses yeux survolèrent alors le plan de la salle et s’arrêtèrent une première fois sur le mur qui lui était destiné puis enfin sur celui qui ornerait leur tableau commun, tout en hochant la tête aux propos de son ami. « Pas de problème, c’est toi le patron. » Sourire en coin, il quitta ses côtés quelques instants pour surveiller la préparation. Une fois de retour, il se retrouva littéralement nez à nez avec l’écriture de Charlie qui lui indiquait alors la liste de ses œuvres à exposer et l’ordre. Il hocha une nouvelle fois la tête en acquiesçant. « Ce sont de bonnes œuvres, je ne peux qu’approuver. Tu comptes mettre en avant la composition que tu as fait aujourd’hui ou ? » En attendant la réponse de l’autre artiste, il suivit son exemple en focalisant son attention sur la grande toile encore vierge. A deux ils la déplacèrent jusqu’à un endroit bien éclairé de la salle, où ils pourraient gesticuler et se déplacer sans aucune gêne. Les mains sur les hanches, le jeune artiste réfléchi sur les multitudes possibilités qui pourraient arpenter la surface du tableau. Après un petit moment il prit la parole. « Ce n’est qu’un avis personnel mais, de mon point de vue l’intérêt d’un tableau commun c’est de voir les similitudes mais également les différences des deux artistes non ? » Il fit une courte pause pour arranger ses pensées et pour être certain que l’autre suivait son raisonnement. « Je pense donc que ça pourrait être intéressant de ne pas forcément se consulter pendant que l’on travaille mais qu’avant de commencer on se donne un thème à respecter. » Son regard se sépara de la toile, son corps agissant de lui-même en le poussant à aller allumer une nouvelle cigarette. La fumée quitta rapidement ses poumons alors qu’il pointait la toile du bout de sa clope. « Comme ça on aura une représentation de nos deux visions réunies. Qu’est-ce que tu en penses ? »

Personne dans l’entourage de Charlie, si ce n’est sa famille, ne connaissait son passé de petit vandale des rues. Il n’en parlait pas souvent. Ce n’était pas tellement une question de honte juste qu’il n’en voyait pas l’intérêt. A l’époque, il avait fait cela pour attirer l’attention et pour provoquer ses parents mais aussi pour leur rappeler sa présence. Charlie étant l’enfant du milieu il passait souvent aux oubliettes jusqu’au jour où enfin son père accepta de l’écouter lui parler de sa passion. Il secoua la tête en riant et en agitant les mains lorsque Noah lui demanda des photos. Même s’il en avait il ne lui en aurait pas montré. Pas besoin qu’il le voit en jogging avec une allure de mec des rues et ses cheveux multicolores, quoique ce détail n’avait aucune chance d’être le plus surprenant pour Noah. « Aucune photo mais je me souviens encore très bien de mes soirées en garde à vue. » Parfois, ou même souvent d’ailleurs, Charlie oubliait les cinq années qui le séparait de Noah. Une différence d’âge pas différente mais qui était bien là. Si son ami sortait à peine de l’adolescence et progressait lentement vers le monde des adultes, lui y avait déjà les deux pieds bien ancrés. Il ne se rendait pas vraiment compte que Noah n’avait pas vécu autant de choses que lui, que leurs expériences, leurs visions de la vie n’étaient pas les mêmes. Dans un sens, cela venait probablement du fait qu’ils se ressemblaient beaucoup et que Charlie avait l’impression d’avoir à faire à l’adolescent qu’il était. Ils partageaient aussi énormément de choses et avaient des tas de points communs. On ressentait néanmoins des nuances dans leurs interprétations et c’était ce qui avait poussé Charlie à lui proposer de réaliser une œuvre tous les deux. Il était persuadé que cela allait donner quelque chose d’absolument innovant. L’idée l’emballait tellement qu’il ne le laissa pas vraiment parler lorsqu’il lui expliqua le plan de la salle. Charlie médita un instant devant sa feuille et finit par grimacer un peu. « Je te demande pas de me dire que je suis le patron, j’le sais déjà mais je te demande ton avis petit con. » Alors il attendit patiemment qu’il revienne de ses casseroles et le tira par la manche pour lui montrer la liste qu’il venait de dresser. Noah mit alors le doigt sur un point important. Charlie leva l’index comme si cela lui avait échappé et à la fin de la liste ajouta un point d’interrogation. Il n’avait pas encore donné de nom à sa création du jour. « Non, pas avant. Je veux pas que les gens s’y intéressent de trop près non plus. » Il ne voulait pas attirer les questions indiscrètes concernant sa pseudo dépression ou même sa vie sentimentale. Ensuite, ils déplacèrent ensemble la grande toile vers un endroit plus lumineux dans le salon. Par automatisme Charlie se dirigea vers son paquet de clopes et s’en alluma une tout en hochant la tête aux paroles de son élève. « T’as tout compris. Toi et moi on est les mêmes mais pas vraiment. Tu saisis ? On a pas le même âge, on a pas vécu les mêmes choses. Alors même si on a les mêmes idées on les ressent forcément de façon différente. » Il approuva également la méthode de travail qu’il proposait car il est vrai qu’ils ne pouvaient pas partir dans n’importe quel sens non plus mais y apporta une petite nuance. « Je veux aucune limite. On part dans la même direction mais on y met tout ce qu’on veut. Je vais passer pour le dingue encore mais tu prends tes tripes et tu les fous dessus. » Il lui passa devant pour prendre une nouvelle canette de bière et en avala presque la moitié d’un seul coup. Il retourna à sa place en essayant d’éviter de piétiner son matériel puis posa sa main sur l’épaule de Noah. Il fixa silencieusement la toile pendant quelques minutes alternant entre sa bière et sa clope. « On fait ce que j’ai dit ? Sauf si tu as peur de te mettre à poils of course. » Il parlait bien évidemment de se mettre à poils sentimentalement parlant mais ne put s’empêcher d’ajouter à sa remarque, qu’il savait ambigue, un petit sourire en coin.